Homélie du Dimanche 13 juin 2021 – 11ème Semaine du Temps Ordinaire – Année B

Par le Frère Jean

Le texte de cette homélie n’a pas été relu par le prédicateur. Le style oral a été conservé.

 

Chers frères et sœurs,

Le Concile Vatican II a souligné dans sa constitution sur la Sainte Écriture, que : « l’Église, surtout dans la sainte Liturgie, ne cesse, de la table de la Parole de Dieu et du Corps du Christ, de prendre le pain de Vie et de l’offrir aux fidèles ». Et dans sa constitution sur la sainte Liturgie, le Concile nous parle à plusieurs reprises de la table du Corps du Seigneur, de la table de la Parole de Dieu ; et encore je le cite : « Les deux parties qui constituent, en quelque sorte, la Messe, c’est-à-dire la liturgie de la Parole et la liturgie Eucharistique, sont si étroitement unies entre elles, qu’elles constituent un seul acte de culte ».

La Parole inspirée ; la Chair du Christ.

Il s’agit bien évidemment de deux types de Présence spécifique, mais de Présence, toutefois, bien réelle du Christ, dans les deux cas. Le Christ présent dans sa Parole, le Christ présent dans le Pain et le Vin, devenus le Corps et le Sang du Christ.

De même que l’Eucharistie est « banquet pascal », ainsi la Parole de Dieu est « nourriture de l’âme, source pure et intarissable de vie spirituelle ».

Aujourd’hui, où le virtuel prend de plus en plus de place dans nos vies, l’Eucharistie avec ses deux tables que nous avons mentionnées, nous ancrent dans le réel de la vie spirituelle.

Les sacrements de l’Église, nous le savons, ne nous mettent pas en relation avec le Christ ressuscité par vidéo-conférence ; et l’accès à la vie surnaturelle ne se dévoile pas à l’aide d’un clavier tactile ; mais quand j’adhère à la foi, ce qui s’accomplit sous mes yeux, c’est tout mon être qui participe au mystère qui se réalise parmi nous. La table de la Parole de Dieu donnée pour nourrir mon intelligence, mon cœur, pour réchauffer ma foi ; la table du Corps du Christ où je deviens participant (commensale), partageant la même table du Festin des Noces de l’Agneau.

Oui, comme l’écrivait le Cardinal Daniélou dans ses notes intimes : « J’aime le réel, j’y adhère ! »

Quand nous disons « Amen » au Corps du Christ reçu au creux de la main, mais surtout au creux de notre foi, ce n’est pas l’idée de Dieu que nous recevons, mais la réalité de sa Présence, de la matière transfigurée par le Saint Esprit. « Amen » est un mot hébreu, araméen, qui signifie : rendre stable, consolider.

Oui, notre foi n’est pas de l’ordre du virtuel mais une adhésion de tout mon être à la Personne de Jésus, le Fils du Dieu vivant, qui a donné sa vie pour moi.

Beaucoup de personnes, quand elles se tournent vers Dieu, veulent être aidées, encouragées, stimulées, par lui, et c’est une très bonne chose.

Mais, peut-être, elles ne voient pas qu’elles ont avant tout besoin d’être sauvées ! Comme l’écrivait St Jean Paul II : « Ce n’est pas une formule qui nous sauvera mais une Personne, et la certitude qu’elle nous inspire : je suis avec vous tous les jours ! ».

Bien souvent, ces personnes acceptent le secours du Christ pour achever leur route avec lui, mais elles n’acceptent pas d’avoir besoin de lui, de sa grâce ! Et ceci, dès le commencement de leur vie.

Jésus n’est pas seulement le « tout » de la destinée humaine, mais il en est le chemin, la vérité, la vie. Et, hors de lui, comme nous le dit Jésus dans l’évangile de Jean, nous ne pouvons rien faire. St Paul dira que : « Soit que nous vivions, soit que nous mourions, nous sommes au Seigneur qui accomplit en nous le « vouloir » et « l’agir ».

La graine de moutarde jetée en terre devient, nous dit l’évangile, un grand arbre aux nombreuses ramures. Le texte sacré a ce détail intéressant, qu’on ne trouve qu’en St Marc, quand il nous dit : « Que celui qui a jeté la graine en terre, dorme ou se lève, nuit et jour, la semence germe et grandit ».

Et bien, nous pouvons dire que cette semence, c’est notre foi ! Ce Don divin reçu au jour de notre baptême ! Et Dieu sait si le terrain où elle doit pousser aujourd’hui nous semble bien ingrat !

(Je ne sais pas d’ailleurs, si dans l’histoire de l’Église, il y a eu des périodes très longues où le sol était uniquement fertile, sans mauvaises herbes… ça n’existe pas… c’est pour le paradis !)

Les parents qui ont à charge l’éducation chrétienne de leurs enfants, en savent quelque chose : transmettre la foi.

C’est alors qu’il faut se rappeler cette parole : « nuit et jour la semence germe ! » ; nous ne serons probablement jamais (encore que) témoins de la moisson, mais ce qui nous est demandé à chacun d’entre nous, c’est de semer envers et contre tout !

Semer la Parole de Dieu, la vie surnaturelle, la vie de foi, en nous-mêmes ; semer ce qui va fortifier en nous le terreau, la bonne terre de notre foi, la vie de prière, l’écoute et la rumination de la Parole de Dieu, l’accueil reconnaissant des sacrements de l’Église qui sont là pour fortifier et pour nourrir notre vie baptismale ; et puis (et ce n’est pas la moindre) : notre participation active et généreuse à la vie de l’Église, en mettant à son service tous les talents que le Seigneur nous a confiés et qui se développent eux-mêmes en les exerçant.

La Parole de Dieu, aujourd’hui comme hier, garde toujours sa même puissance, sa même fécondité ; un rameau tiré d’un vieil arbre, nous a rappelé le prophète Ézéchiel dans la première Lecture, est susceptible de reverdir ailleurs : « Je renverse l’arbre élevé et relève l’arbre renversé, je fais sécher l’arbre vert et reverdir l’arbre sec ».

Oui, d’une souche apparemment morte peut ressurgir un rejeton vigoureux ; et ceci est très encourageant pour notre vie spirituelle.

Ne pas s’étonner des traversées de désert et d’obscurité dans notre vie chrétienne ! St Jean de la Croix nous fait remarquer que la note substantielle de la foi est, ce qu’il appelle, « un habitus obscur » : suffisamment de lumière pour aller de l’avant, mais aussi toute une part d’obscurité, voire de ténèbres, sinon ce ne serait pas la foi.

La foi, frères et sœurs, n’est autre que l’acte de croire, quand il n’y a pas de raisons de croire !

L’époque que nous traversons, invite les croyants, peut-être de façon tout à fait plus particulière, à s’ancrer pour lutter intérieurement, afin d’enraciner la foi dans une certaine mort.

Semer en soi-même ; semer autour de nous.

Les chemins de Dieu, nous le savons, ne sont pas nos chemins ; les rejets de la semence ne sauraient engendrer ou justifier parmi nous, dans l’Église, un quelconque fatalisme paresseux.

Cheminement dans la foi, sans voir, mais dans la confiance, nous devons nous attacher à plaire au Seigneur, comme nous y invitait la deuxième Lecture aux Corinthiens : « Que nous soyons chez nous ou en exil, notre ambition, c’est de plaire au Seigneur ».

Je ne sais pas quel saint disait (je crois que c’est Ste Thérèse de l’Enfant Jésus) : « Dieu fait toujours mes volontés parce que, moi, je fais toujours les siennes ».

La graine de sénevé que nous jetons en terre, aujourd’hui, portera demain du fruit. Jésus lui-même, par sa vie, pas sa mort, jeté en terre par son ensevelissement, a porté, et continue de porter jusqu’à la fin des temps, le fruit que le Père lui a demandé : rassembler tout l’univers en un seul Corps dans l’unité.

Oui, avec St Paul, dans le prologue de sa Lettre aux Éphésiens, nous pouvons exulter en disant :

« Béni soit Dieu le Père ! Il nous a prédestinés à être, pour lui, des fils adoptifs par Jésus Christ ; ainsi l’a voulu sa bienveillance, à la louange de sa gloire »

Amen !

 

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