Homélie de la Nativité du Seigneur 2021 – Messe de la Nuit – Solennité du Seigneur – Année C
Le texte de cette homélie n’a pas été relu par le prédicateur. Le style oral a été conservé.
Par le Frère Jean-Marie
« Bien-aimés, dit Paul à Tite, la grâce de Dieu s’est manifestée pour le salut de tous les hommes ».
Oui, frères et sœurs, Dieu veut le salut de tous les hommes sans exception ; mais cette volonté divine que rien ne peut arrêter, suppose la correspondance de l’homme, la correspondance de la créature qui consent à s’ouvrir et à accueillir Celui qui est son sauveur, Celui qui vient lui partager sa vie, son amour.
Oui, Dieu veut le salut de tous les hommes, et qu’ils parviennent à la plénitude de la connaissance. Telle est la volonté de Dieu ; c’est ce qui se passe dans l’histoire humaine.
Cependant, Dieu attend de l’homme cette ouverture, cette correspondance, afin qu’il y ait alliance, afin qu’il y ait relation et non rejet, indifférence, oubli.
Si la grâce s’est manifestée pour le salut de tous les hommes, elle s’est manifestée pour chacun et chacune d’entre nous. Le salut n’est pas suspendu au-dessus de nos têtes, comme les nuages, et qui pourrait de temps en temps descendre sur l’humanité. Le Seigneur vient frapper à la porte de notre âme ; l’image que l’auteur de l’Apocalypse prend au début de l’Apocalypse pour signifier l’intimité que Dieu veut avoir avec l’être humain ; « je me tiens à la porte et je frappe, chez celui qui ouvrira, j’entrerai et je prendrai mon repas, lui avec moi et moi avec lui ».
Telle est la vie chrétienne ! Telle est la vie humaine ! Telle est notre destinée éternelle ! Si nous nous ouvrons à cette grâce qui nous est proposée.
La grâce de Dieu est l’expression du Don de Dieu à notre égard, l’expression de sa bonté pour nous ; Dieu est bienveillant à notre égard, il veut notre bien ; Dieu est bon et il partage cette bonté. Le bien est diffusif de soi et nous sommes appelés à accueillir cette bonté et à nous laisser bonifier.
L’Église nous enseigne que la grâce est le secours gratuit que Dieu nous donne ; qu’il nous donne et qu’il nous prépare à recevoir ; il attend de nous le consentement ! La grâce de Dieu, c’est ce secours absolument gratuit qui nous précède et qui vient de l’amour même de Dieu et qui nous prépare à répondre à son appel, à savoir, devenir ses enfants dans sa propre vie, participants de sa nature divine et être introduits dans la vie éternelle. La grâce est la participation même à la vie de Dieu. C’est ce que nous donne le sacrement de baptême.
Cette grâce nous est donnée dans son Fils unique et éternel, qui partage sa gloire au sein de la Trinité et qui se fait homme pour notre salut. C’est ce que nous fêtons en cette Nuit, la naissance de Jésus ; Jésus, Christ et Seigneur ; Jésus, serviteur, Fils de l’homme ; Jésus, vrai Dieu et vrai homme.
C’est en lui Jésus, et en lui seul, que nous recevons le salut, la justification, le pardon de nos péchés et la sanctification, qui est le but de la création, de la rédemption et du mystère de l’Incarnation. En lui, en cet enfant de la crèche, nous recevons grâce sur grâce, comme le disait tout à l’heure Jean à la fin du Prologue, à la fin des Vigiles.
La grâce du Christ est le Don gratuit que Dieu le Père nous fait de sa propre vie, dans son Fils par son Esprit Saint. C’est la grâce sanctifiante, appelée aussi déifiante, qui nous rend comme Dieu, que nous recevons dans ce sacrement du baptême qui fait de nous des chrétiens, des membres de l’Église, des membres vivants de l’Église.
Dès la création du monde, Dieu veut que nous soyons Dieu, non par nature, mais par participation, c’est la volonté de Dieu ; mais l’homme au lieu de recevoir ce cadeau a voulu s’autoproclamer créateur et Dieu. C’est ce que nous vivons un peu aujourd’hui, qui a traversé toute l’histoire humaine : nous rejetons Dieu, nous voulons nous passer de Dieu, et nous nous prenons pour Dieu. Et nous voyons le résultat…
Nous sommes appelés à être déifiés mais à recevoir ce Don de la main-même de Dieu, lui qui vient nous transformer. Cette grâce sanctifiante est une disposition stable dans notre âme, et surnaturelle, qui perfectionne notre âme pour la rendre capable de vivre avec Dieu et d’agir comme Dieu veut que nous agissions, par, et dans son amour. Cette grâce, la grâce divine est principalement dans le Don de l’Esprit Saint que nous recevons au baptême et à la confirmation.
Oui ! La bonté de Dieu s’est manifestée ; Jésus nous apporte la bonté de son Père, nous manifeste cet amour ; voilà la bonne nouvelle : l’Évangile, afin que nous soyons transformés. C’est une réalité, c’est une rencontre, c’est une expérience, que nous sommes appelés à vivre et pas un rond-rond de vie chrétienne, comme semi anesthésiés, où nous ne sommes plus réactifs à la vie divine.
Nous sommes appelés – et c’est paradoxal – à être éveillés durant cette Nuit, pour voir le mystère merveilleux qui nous est donné ; et sortir peut-être de nos ornières, de nos habitudes, de notre confort sociologique, y compris avec les étiquettes chrétiennes, catholiques, bien rangées !
Nous sommes appelés à nous laisser bousculer par la grâce divine, transformer, convertir, afin d’être des hommes et des femmes, vivant de la vie de la Trinité ; et témoins de cet amour de Dieu, de cet amour de miséricorde, dans le monde aujourd’hui. Non pas de répéter des formules toutes faites ou de défendre des valeurs ; bien sûr qu’il faut connaître la foi chrétienne ; bien sûr que nous avons des valeurs à vivre, mais ces valeurs doivent être vivifiées par des racines ; un tronc qui n’a plus de racines, est un arbre mort, même s’il a encore des feuilles. C’est une question de temps !
Soyons des hommes et des femmes, vivants, enracinés, dans la Personne du Christ Jésus, vivant de lui par la prière, la vie sacramentelle, la lecture de la Parole de Dieu, cet amour qui nous habite, ce feu qui nous habite et nous transforme, et qui veut transformer l’humanité. Nous ne transformerons pas le monde par des structures, par des changements de structure, c’est utile mais sans plus. Nous avons à transformer le monde en commençant par soi-même, et en vivant pleinement de la vie trinitaire ; alors là, oui ! Nous pourrons rayonner et transformer l’humanité de l’intérieur et en vérité, pas selon les apparences !
Nous sommes appelés à recevoir cette grâce qui comprend évidemment le Don de l’Esprit Saint.
Mais le Don de l’Esprit Saint nous donne différents Dons pour nous associer à l’œuvre que le Christ a instituée, au salut qu’il veut pour nos frères et sœurs ; nous sommes devenus participants du salut éternel de nos frères et sœurs en humanité ; nous avons la responsabilité du Salut de nos frères.
Nous nous faisons beaucoup de soucis pour la pandémie, pour d’autres éléments – et c’est juste et c’est nécessaire ; mais combien de prudence (à juste titre) prenons-nous contre la pandémie… Combien de prudence prenons-nous contre le péché ? Quels sont les masques que nous employons contre le péché ? Quels sont les gels hydrauliques au travers desquels nous nous désinfectons du péché ? Quels sont les vaccins que nous prenons contre le péché ?
Nous sommes appelés en cette Nuit de Noël à nous ouvrir à cette joie merveilleuse, à cette nouveauté créatrice : Dieu vient parmi nous ! L’Emmanuel !
Nous sommes appelés à participer à la construction de son Corps qui est l’Église ; l’Église, qui est composée de ceux et celles qui vivent déjà de la vie de Jésus ; de ceux et celles qui vivent de la vie trinitaire ; et toute l’humanité est appelée à rentrer dans cette vie trinitaire, qui n’est autre que la réception de l’évangile : de se savoir aimé de Dieu ; aimé à tel point que Dieu a donné son Fils, qui nait aujourd’hui pour chacun des êtres humains dans toute l’histoire de l’humanité.
Ce don reçu au baptême et à la confirmation, nous sommes appelés à le déployer tout au long de notre vie ; nous sommes en devenir ; nous sommes appelés à une croissance sans cesse renouvelée, quel que soit notre âge.
Nous sommes appelés à remplir, à accomplir la mission que le Seigneur attend de nous, envers nos frères en humanité, aujourd’hui, tel que nous sommes, chacun et chacune de nous dans cette chapelle. Dieu a toujours l’initiative ; il est toujours le premier à faire le pas et à nous solliciter. Il attend de nous notre réponse ; il sollicite notre réponse libre et aimante ; il n’y a pas d’amour sans liberté ; la liberté peut manifester l’amour ; sans liberté, nous ne pouvons pas manifester notre amour.
Le Seigneur attend de nous une réponse libre, aimante, pour réaliser le dessein de miséricorde qu’il a pour nous, et la mission qu’il veut que nous accomplissions avec lui, aujourd’hui.
L’Église est la continuation du Verbe fait chair ; Jésus continue à agir dans le monde, par son Église, par sa vie divine, comme des canaux de grâce qui viennent vivifier, irriguer, l’humanité et redonner vie aux âmes mortes par le péché.
Nous sommes appelés à vivre cette journée dans la joie, la paix, de se savoir aimés avec certitude, mais aussi d’être aiguillonnés dans notre responsabilité de chrétien, et de témoin de cet amour de miséricorde, pour ceux et celles qui vivent dans des déserts spirituels, des déserts surnaturels, et qui attendent l’eau vivifiante du Salut qui est donné par Celui que nous célébrons cette Nuit : Jésus le Christ, notre Seigneur.