Homélie de la Sainte Famille – Dimanche 26 décembre 2021 – Année C
Le texte de cette homélie n’a pas été relu par le prédicateur. Le style oral a été conservé.
Par le Frère Jean-Baptiste
Frères et sœurs,
Pour la fête de la Sainte Famille, que nous fêtons cette année le lendemain de Noël, nous méditons le recouvrement de Jésus au temple par ses parents au cours d’un pèlerinage qu’il fit à Jérusalem ; St Luc précise qu’il avait alors douze ans.
On sait qu’à cet âge, le jeune israélite devait effectuer un cérémonial rituel prouvant que l’adolescent ait atteint l’âge du discernement, et inaugure sa pleine responsabilité vis-à-vis de la loi. Ce qui lui conférait une certaine maturité spirituelle et correspondait pour nous peut-être à la démarche de confirmation personnelle de notre baptême.
Il devient alors fils de la Torah, de la loi ou du commandement, du précepte. Jésus a pris au sérieux ce cérémonial ; il s’y est préparé sans doute avec l’aide de ses parents. Souvenons-nous que la Vierge avait été instruite au temple dans sa jeunesse ; elle connaissait bien les Écritures ; mais on doit aussi penser que Jésus, étant le Verbe incarné, pouvait recevoir la lumière divine immédiatement. Jésus possédait une intelligence inégalable, transparente, une mémoire sans faille qui lui permettait de comprendre les textes sacrés à la perfection. N’est-il pas lui-même la Parole qui vient accomplir les Écritures à travers sa mission de Prêtre, de Prophète, de Roi, de Messie-sauveur.
À douze ans, Jésus a déjà une connaissance plénière de la Bible qui déborde les compétences des anciens docteurs ; on comprend que Jésus écoutait non seulement ces docteurs mais, comme le dit St Luc, leur posait des questions ; et que ceux-ci s’extasiaient sur son intelligence et ses réponses. Certains exégètes n’hésitent pas à qualifier cette scène du titre d’épiphanie car Jésus se révèle directement et publiquement comme Maitre d’interprétation des Écritures.
Pourtant, en le voyant ainsi ses parents furent stupéfaits et sa mère lui dit « vois comme nous avons souffert en te cherchant »… Quel décalage pour Marie et Joseph avec Jésus !
« Mon enfant, pourquoi nous as-tu fait cela ? »
Arrêtons-nous à cette question de la Vierge qui après avoir dit à l’ange « comment cela se fera-t-il ? », elle dit « Pourquoi ? » devant Jésus. Serait-ce un reproche, l’expression d’une impatience ? Peut-être un peu ! Mais ce dut être surtout, avant tout jugement, l’expression d’un grand désir d’être éclairée et de comprendre cette attitude inhabituelle de sa part.
Pourquoi Jésus choisit-il de rester au temple ? Belle interrogation pour la Vierge qui cherche à être éclairée, pour saisir les motivations plus hautes et plus profondes qui donnent raison à un pareil choix. N’y a-t-il pas toujours, pour nous croyants, quelqu’un de plus grand au-dessus de nous ? Il nous faut savoir l’entendre et laisser les autres l’entendre.
À la question de Marie sa mère, Jésus répond par une autre question : « Ne le saviez-vous pas ? C’est chez mon Père que je dois être ».
La famille terrestre est un bien, elle est le lieu d’épanouissement ; mais elle n’est pas un but en soi. Pour le chrétien, pour nous, c’est l’Église et même le Royaume qui est le but de la famille. Ce qui importe au premier chef, quel que soit notre état de vie, c’est de s’ajuster à la volonté de Dieu, car nous sommes tous les fils d’un unique Père des Cieux. La famille véritable, c’est celle où l’on prie Dieu ensemble, où on le loue, et où l’on dit « que ta volonté soit faite sur la terre comme au ciel » ; avant de dire « donne nous notre pain de ce jour ».
Si Jésus veut rester au temple, c’est pour qu’on le cherche et qu’on le trouve comme chez lui, comme chez son Père. La réponse de Jésus à la Vierge Marie et à Saint-Joseph, montre l’affirmation qu’il donne désormais à sa relation personnelle envers son Père d’en-haut, sa relation prioritaire à Dieu.
Cet événement inattendu dans la chronologie de son histoire marque une nouvelle période de son rapport unique au Père des cieux, et nous introduit, si on peut dire, au cœur du mystère le plus profond du Christ.
Il est normal que dans l’immédiateté de l’événement, Marie et Joseph ne comprirent pas. Cependant, Saint Luc mentionne, aussitôt après, une confidence de la Vierge Marie : sa mère recueillait et gardait dans son cœur ces événements.
Marie aura le privilège de demeurer encore vingt ans auprès de son fils dans une intimité, qu’on peut qualifier entre autre, de théologale ; elle vit grandir le Christ en taille, en sagesse et en grâce. On peut être sûr que Jésus lui a communiqué, d’une manière ou d’une autre, bien des choses pour la préparer à la séparation plus radicale de sa mission ; il l’amènera à jouer son rôle propre, irremplaçable, d’Auxiliatrice auprès de son ministère de Salut, puis après son Mystère pascal, pour devenir en toute vérité la Mère de l’Église.
Rendons grâce à Dieu pour ses desseins inénarrables envers toutes ses créatures et qu’Il poursuit encore aujourd’hui.
Amen !