Homélie de la Solennité des Saints Fondateurs de Cîteaux

Samedi 26 Janvier 2019 – Année C

Par le Frère Jean-Baptiste

Le texte de cette homélie n’a pas été relu par le prédicateur – Le style oral a été conservé

 

Frères et sœurs, la fête de nos bienheureux pères fondateurs de Cîteaux nous oblige à méditer sur les origines de notre ordre cistercien à la fin du XIème siècle.

Ce qui faille noter en premier lieu, c’est que sous la mouvance de la réforme grégorienne, qui imprégnait les milieux monastiques, que va s’effectuer la fondation.

Grégoire VII s’efforça d’arracher l’Église institutionnelle aux contraintes des puissants de ce monde. Il faut nous souvenir que ce Pape n’hésita pas à excommunier certains évêques indignes et même l’Empereur Henri IV de Germanie. C’est la mise en marche de cette réforme qui contribua à développer et à épanouir la civilisation chrétienne encore en croissance aux confins de l’Europe. Ce fut une époque d’effervescence, avant tout spirituelle, qui entraina l’essor d’une culture qui nous étonne encore, surtout en ce qui concerne l’architecture religieuse : cette période fut marquée, comme le sera plus tard Vatican II, par un retour aux sources mais avec un souci d’adaptation à la nouvelle mentalité de la société… période de tâtonnements, donc, dont la vie de St Robert, notre premier fondateur, est une illustration.

C’est à cette époque, en 1075, alors qu’il était prieur de St-Michel de Tonnerre qu’il décida de rejoindre un petit groupe d’ermites installés dans une forêt voisine et de fonder avec eux une nouvelle Abbaye à Molesmes.

Pourtant rapidement la vie austère s’amenuise avec de nouvelles recrues. Ce qui oblige Robert à envisager vingt ans plus tard, à reprendre son projet initial de suivre de plus près la règle bénédictine – en simplifiant, notamment, l’expression liturgique, et une recherche plus effective de la solitude pour la prière et l’étude – tout en demeurant fidèle au charisme de la vie commune, équilibre toujours fragile auquel il revient à l’Abbé de surveiller. Le petit Exorde nous relate : « Robert, premier Abbé Molesmes, au diocèse de Langres et quelques frères allèrent trouver le vénérable Hugues, légat du Saint Siège qui était Archevêque de Lyon, pour s’engager à ordonner leur vie selon l’Observance de la Sainte règle de notre père Benoit.

Le groupe se dirigea en 1098 vers une solitude appelée Cîteaux, où dit le petit Exorde : « ils firent un coude dans l’épaisse forêt afin de dégager un espace propice à la construction d’un nouveau monastère avec l’accord de l’évêque de Chalons ».

Malheureusement 18 mois plus tard, Robert dut retourner à Molesmes sur la demande du Pape pour y rétablir la paix. Heureusement Albéric, bon compagnon de St Robert et convaincu de son bon propos, concrétisa son projet. Il construisit le nouveau monastère dans un lieu plus pratique et plus sain : une petite église fut construite en 1100. Il mit en œuvre les éléments propres à Cîteaux en mettant l’accent sur la culture, la pratique régulière du travail et un souci de préserver un climat de recueillement. C’est durant son abbatiat que les moines revêtiront la tunique blanche ou plus claire qui les différenciera des Bénédictins. C’est lui encore qui mettra Cîteaux, encore très fragile, sous la protection de la Vierge Marie en son Assomption.

Etienne lui succédât. Ancien élève de l’Abbaye bénédictine de Sherborne en Angleterre, en pèlerinage à Rome, il s’était mis sous la direction de Robert à Molesmes, et le suivit avec Albéric dans son installation à Cîteaux. Il poursuivit l’œuvre de ses prédécesseurs. Avec sa grande culture et son talent d’organisateur, il lui revint de structurer l’Ordre naissant, car c’est sous son abbatiat qu’affluèrent un grand nombre de sages vocations : parmi eux, l’illustre Bernard.

Avec les cinq abbés des premières filiations, il rédigea en 1119 (c’est le 9ème centenaire cette année) la Charte de Charité qui institua des relations qui devaient entretenir entre les différents monastères, le bon ordre et l’entraide, avec la tenue annuelle d’un Chapitre général qui jouait le rôle suprême du corps législatif de l’ensemble… approuvé d’ailleurs par le Pape Calixte presque aussitôt et ne sera confirmé que 35 ans plus tard par le Pape cistercien Eugène III.

À Etienne revient d’avoir su accueillir la nouvelle génération qui allait donner à l’Ordre cistercien un rayonnement sur toute la chrétienté d’alors.

La spiritualité de l’amour de Dieu deviendra plus incarnée et plus accessible à tous. Les grands Abbés « docteurs » de la seconde génération insisteront sur les bienfaits, non plus seulement de la solitude mais encore sur la vie communautaire qui reflète la vie ecclésiale et anticipe la Jérusalem céleste.

Nous pouvons donc en ce jour de fête, demander à nos saints fondateurs de poursuivre avec leur enthousiasme, notre humble et belle vocation de priants, de veilleurs dans l’Église d’aujourd’hui et qu’ils nous accordent, à toute la famille cistercienne, à un renouvellement permettant d’accueillir les générations futures en quête de sens.

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