Homélie de l’Assomption de la Vierge Marie – Samedi 15 août 2020, année A

Par le Frère Jean-Marie

Le texte de cette homélie n’a pas été relu par le prédicateur. Le style oral a été conservé.

 

Frères et sœurs bien aimés,

C’est le jour par excellence de chanter, de prier, de réciter le Magnificat.

Marie qui a accueilli Jésus, son Fils, dans son sein, dans son ventre ; qui l’a tenu dans ses bras, petit bébé. C’est ce même Jésus, Fils de Dieu, Verbe éternel qui la reçoit aujourd’hui dans le Royaume de son Père, dans la charité brulante de l’Esprit Saint.

Frères et sœurs bien aimés, fêter Marie dans le mystère de son Assomption, c’est fêter la victoire de l’espérance. L’espérance sur tout mal, tout péché, toute déviation, toute mort. Plus encore c’est fêter la réalisation du dessein de Dieu sur l’humanité toute entière. L’Assomption de la Vierge Marie est l’accomplissement du projet créateur et de l’acte rédempteur de la Trinité Sainte, du Père par son Fils, dans l’Esprit.

Marie au ciel, c’est le plan de Dieu, dans son développement complet.

Marie montant au ciel, c’est la réussite pratique de la volonté de Dieu sur chacun et chacune d’entre nous, ce à quoi nous sommes appelés de manière concrète.

Marie entrant dans la gloire du Royaume, accueillie par son Fils, c’est enfin le couronnement définitif de la dignité humaine, de la dignité de chaque être humain et de sa destinée éternelle.

L’Assomption de la Vierge nous situe au centre du projet créateur de Dieu, à savoir, la déification de l’homme, la participation de l’homme à la vie même de Dieu, la déification de la personne humaine, âme et corps, Don de la grâce divine et de la miséricorde divine… la communion de vie et d’amour de l’homme avec son Créateur et Sauveur, plus encore qu’au paradis terrestre à la brise du jour, dans la plénitude de la contemplation du visage de Dieu tel qu’Il est !

Nous ne sommes plus appelés au paradis terrestre en vivant dans un jardin agréable, mais nous sommes appelés au paradis céleste.

L’introduction de Marie avec son corps et son âme dans la gloire du Royaume de Dieu est l’inauguration à la suite du Christ ressuscité, son Fils, de ce que le Père a prévu de toute éternité pour l’humanité entière comme pour chaque être humain en particulier.

Dieu n’aime pas d’un amour collectif – « je vous confonds tous dans un même amour » disait une spécialiste qui recrutait les futurs chanteurs et parmi eux des gens très célèbres – Dieu ne nous confond pas dans un amour collectif, Il nous aime personnellement même s’Il nous aime tous ensemble. C’est un amour personnel, vivant, vivifiant !

Le Seigneur veut que nous ayons la vie, et « la vie en en abondance » comme dit Jésus. Il veut nous partager sa propre vie. Il devient la Vie de notre vie.

L’Assomption de Marie est comme le signe parfaitement accompli de ce que Dieu veut pour chacun. Marie, à la suite de Jésus, et en Lui, entre comme en avant-coureur, de ce qui attend tout le corps de l’Église, et toute l’humanité ; toute l’humanité appelée à intégrer ce Corps du Christ qui est l’Église et qui n’est pas un club pour privilégiés ou une association de gens bien-pensants mais qui est l’humanité recréée dans la miséricorde divine et vivant de la vie trinitaire. Voilà ce qu’est l’Église : l’humanité renouvelée.

L’Assomption de la Vierge est l’accomplissement de ce que Dieu veut pour nous, à savoir notre bonheur éternel, par notre participation à sa propre vie dans son Royaume.

Mais ce mystère nous révèle qui est Marie. Toute la vie de la Vierge, comme toutes les dimensions de sa personne humaine, sa dimension de femme, sont tendues vers la réalisation de sa maternité divine. Tout est orienté dans la vie et dans la personne de Marie, vers la maternité divine de son Fils Jésus.

Cette maternité divine, dans sa virginité gardée, qui nous donne, nous transmet l’Auteur même du Salut : le Christ Jésus, Fils de Dieu, Lui le Logos, le Verbe éternel, la seconde Personne de la Trinité.

Mais aussi ce Fils de Dieu, dont la Personne est divine, devient pleinement, par le mystère de l’incarnation, Fils de Marie. Marie qui l’a conçu et qui l’a porté en elle, qui lui a donné son ‘donné’ génétique.

C’est pourquoi cette solennité de l’Assomption nous introduit dans la joie de Marie. Joie de Marie, accueillie à son tour par ce Fils de Dieu, son propre Créateur et Sauveur, qu’elle-même avait accueilli quelques décennies plus tôt, par sa foi et dans sa chair lors de son ‘oui’, de son Fiat, qui a ouvert la porte au Salut, qui a ouvert la porte à l’accomplissement de la rédemption de l’homme.

Mais cette réalité de la présence de la Vierge, corps et âme, c’est-à-dire de l’intégralité de sa personne humaine, dans la gloire céleste, éclaire d’une lumière unique et nécessaire la dignité et la destinée de chacun et de chacune d’entre nous.

Si par la résurrection du Christ Jésus, notre Sauveur, et par le signe efficace de l’Assomption de Marie, nous sommes destinés à ce bien suprême… quel regard devons-nous porter sur chaque être humain ?

Un regard d’éternité, un regard de bienveillance, un regard de vie, puisqu’il est ou elle est destinée à cet avenir qui n’a pas de fin.

Quelle beauté, quelle grandeur que la personne humaine ! Quelles que soient ses caractéristiques concrètes ou la spécificité de sa vie, les circonstances mêmes de sa conception… dès le premier instant, Dieu crée son âme qui informe et structure son être et tout son corps. Cette âme immortelle dès la conception et ce corps qui n’est pas un amas de chair mais vivifié par cette âme spirituelle voulue par Dieu et unique dans l’histoire humaine, ce corps promis à la résurrection et à la glorification en Dieu pour l’éternité.

Frères et sœurs, telle est notre foi, la foi catholique !

En ce jour, nous pouvons avec une véritable allégresse, recevoir le Seigneur et lui rendre grâce pour le Don ineffable qu’il nous fait et qui est déjà réalisé et manifesté en la Vierge Marie, Mère de Jésus, Mère de Dieu et « notre Mère dans l’ordre de la grâce » comme le dit le Concile Vatican II dans Lumen Gentium.

Mais aussi, quel regard admiratif pouvons-nous porter sur notre propre vie et sur tout être humain : cet être humain quel qu’il soit, lui qui est un Don de Dieu, lui qui est voulu pour lui-même, lui qui a une destinée immortelle dans la vie même de la Trinité !

Oui, joie ! Admiration, action de grâce pour l’œuvre de Dieu et sa fécondité insoupçonnée, dans notre vie, dans la vie des autres, dans la vie de toute humanité.

Quelle responsabilité, également ! Cette responsabilité fraternelle envers nos frères et sœurs : comme Dieu disait à Caïn : « qu’as-tu fait de ton frère ? »…qu’il venait d’assassiner.

Nous avons la responsabilité fraternelle de porter chacun de nos frères et sœurs en humanité, sans les juger, sans les condamner… en discernant le bien et le mal ! Dieu seul connait les cœurs.

Et « si notre cœur vient à nous condamner » dit St Jean, « Dieu est plus grand que notre cœur et Il connait toutes choses ».

Mais nous avons le devoir, la responsabilité, de porter dans la prière, dans l’intercession par l’exemple de sa vie cohérente – ce qui n’est pas rien – et par notre témoignage en parole, en écrit, en action, auprès de nos proches, en famille, dans notre travail, dans la vie sociale et politique, de la beauté de la personne humaine.

Et cela à tous les niveaux, surtout envers ceux et celles qui sont les plus faibles, les plus vulnérables. De l’enfant à naitre au vieillard agonisant, de l’handicapé physique et mental le plus profond au malade incurable qui termine sa vie.

Quelle délicatesse, quelle attention, quel amour, devons-nous déployer, quelle inventivité pour nous occuper et prendre soin des plus petits, des plus pauvres, des plus fragiles, quelle que soit leur situation et quelles que soient les personnes.

Jésus nous dit « tout ce que vous avez fait à l’un de ces petits, c’est à moi que vous l’avez fait ».

Il ne demande pas la nationalité ! S’ils sont catholiques ou pas ! Quel est leur âge, leur condition…

« tout ce que vous avez fait à l’un de ces plus petits ».

Frères et sœurs, mettons toute notre énergie, notre intelligence, notre force, notre savoir-faire, surtout notre cœur au sens biblique, au service de la vie et de l’amour du prochain. Et du lointain !

Que ce lointain devienne proche grâce à notre amour.

Que les lois humaines soient au service du bien, au service de la vie, de la croissance des individus et de la société comme telle.

Quelle joie quand des lois, nous font progresser vers le bien, rendre plus solidaire, respectent la vie, surtout des plus faibles.

Quel soulagement lorsque la peine de mort a été supprimée en France. Nous voyons un vrai progrès dans le regard que nous portons sur un être humain, même le plus coupable, le plus criminel : la miséricorde lui est proposée pour que, dans le temps qu’il reste, on le respecte et qu’il puisse évoluer vers le bien. Sa liberté reste entière mais la grâce lui est proposée de progresser et peut-être de réintégrer la société pour construire avec les autres.

Mais cette même miséricorde, frères et sœurs… pourquoi nous ne la donnons pas aux enfants à naitre ? Pourquoi nous avons supprimé la peine de mort, à juste titre, envers les criminels, et pourquoi nous pratiquons cette même peine envers les enfants à naitre ? Et cela de façon massive et de plus en plus intense.

En ce jour, accueillons la lumière de la vie qui jaillit du Ressuscité par Marie, notre Mère. Elle qui a enfanté Jésus et qui nous prend sur son cœur.

Encore une fois, nous ne sommes pas là pour juger les autres mais pour leur annoncer la bonne Nouvelle, et dans la société actuelle telle qu’elle est… sans nous dépiter sur le plus ou le moins mais en donnant notre vie !

Beaucoup de frères et sœurs dans la foi donnent leur vie pour Jésus aujourd’hui : en Afrique, en Asie, en Amérique latine, pour préserver la chasteté, la virginité, pour préserver la justice sociale, pour préserver la vie, pour la liberté des autres.

Nous sommes appelés aujourd’hui à rentrer dans le temps du témoignage.

Laissons-nous illuminer, vivifier, par cette Lumière divine et cette Vie sans fin, afin d’être, pour aujourd’hui, là où nous sommes, et jusqu’au bout de notre route, des témoins lumineux, avec la grâce de Dieu et des martyrs, et rayonnants de cette Vie éternelle qui n’est autre que le Christ Jésus, notre Seigneur et Sauveur.

Amen !

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