Chers frères et sœurs,
Au cours d’un été très chaud, la solennité de l’Assomption de Marie, appelée par les chrétiens d’orient : la Dormition de la Mère de Dieu, apparait parmi nous comme un souffle de fraicheur.
Le choix que Dieu a fait de Marie, parmi toutes les femmes, pour se revêtir de notre chair, a été figuré par la toison de Gédéon dans le livre des Juges ; en effet de même que cette toison de Gédéon a reçu seule la rosée céleste pendant que toutes les terres voisines restaient sèches, de même aussi Marie, seule, a été remplie de cette rosée divine dont aucune autre créature n’a été trouvée digne dans le monde entier.
Disons toute suite que Marie que nous honorons comme conçue sans péché dès le premier instant de sa création dans le sein de sa mère, et n’ayant commis aucun péché au cours de son existence, Marie n’en est pas moins pour autant une créature humaine ; elle est bien de chez nous, de notre peuple, rachetée comme chacun de nous par la grâce de Dieu et par le sacrifice du Christ sur la croix, et non pas par ses propres mérites. À la différence de nous par contre, Marie est la femme qui a totalement et parfaitement répondu par toute sa vie à ce don prodigieux que Dieu lui faisait : devenir la mère de son Fils, donc la Mère de Dieu. Comme le dit l’apocalypse : Marie est la femme revêtue de lumière.
Oui, « Vêtue de lumière comme d’un manteau, commente st Bernard, Marie a enveloppé Jésus de la substance de sa chair et Jésus l’a revêtue de la gloire royale ».
Dans le livre de Jérémie, on lit que le Seigneur crée du nouveau sur la terre : la femme cherche son mari… parole un peu énigmatique. Jusqu’à aujourd’hui, veut dire le prophète, ce fut l’Époux, c’est-à-dire Dieu, qui cherchait et qui recherchait la femme infidèle qui servait les idoles ; mais un jour viendra prophétise Jérémie, où il n’en sera plus ainsi ; ce sera la femme (c’est-à-dire dans le langage de l’Ancien Testament, la communauté de l’Alliance, qui pour nous est l’Église) qui cherchera son Époux et qui se pressera contre lui.
Cette prophétie se réalise de nos jours ! L’Église dont nous sommes les membres vivants par notre baptême, n’a d’autre fin que de s’unir au Christ, et de vivre de lui, par lui et pour lui ; la barque Église ancrée dans la mort et la résurrection du Christ, voguant sur les flots agités de ce monde, enveloppée du manteau de Marie va de l’avant vers le Royaume des cieux.
Nous sommes confiants en la protection de la Mère de Dieu, qui est aussi notre Mère, nous pouvons lui faire une confiance totale.
Il est frappant d’entendre – vous l’avez peut-être entendu dans votre entourage ou de vos enfants – d’entendre les jeunes qui sont revenus il y a quelques jours des JMJ au Portugal, et qui sont encore je ne sais pas pour combien de temps sur un petit nuage… et tous témoignent de cette expérience extraordinaire qu’ils ont fait de l’Église, de la catholicité de l’Église.
Ils ont rencontré des brésiliens, des coréens, des japonais, des italiens, quelques français quand même parmi lesquels ils étaient ; ils ont fait l’expérience qu’ils étaient unis autour du successeur de Pierre et de tous les évêques en un seul peuple, le corps du Christ, belle expérience qui les marque – espérons-le – pour toujours.
C’est pourquoi aujourd’hui nous confions à Marie chacune de nos vies pour que notre baptême se déploie en plénitude en chacun de nous selon le dessein de Dieu, en chacune de nos familles humaines et religieuses ; nous lui confions le monde entier si blessé par les guerres de toutes sortes, par ce que l’apôtre Jean appelle le péché du monde ; nous lui confions notre pays bien aimé consacré depuis les origines du christianisme à sa maternité. Nous lui confions notre région, notre village et ses habitants ; nous lui confions enfin notre communauté dans cette abbaye qui a été édifiée en son honneur, il y a cette année 875 ans ! Nous lui confions le présent de notre communauté et son avenir afin que Marie la protège de tout danger et qu’elle nous conduise sur le chemin de sainteté que Dieu veut pour nous dans la grâce de l’Esprit Saint ; et nous lui confions tous les visiteurs qui au cours de l’année passent en ce lieu, et dont nous pouvons témoigner que nombre d’entre eux reçoivent un rayon de la lumière de Dieu.
Dans un an à ce jour, si Dieu le veut, nous célébrerons cette solennité dans l’Église abbatiale qui pourra accueillir tous ceux qui viennent trouver auprès de Dieu le repos en cette abbaye élevée en l’honneur de Marie dans le mystère de son Assomption. Nous espérons alors que sera achevé et installé dans une allée collatérale de l’Église une sculpture qui représentera la « Vierge au Manteau » : grande sculpture dans un coin qui lui sera consacrée et où l’on pourra prier de façon particulière pour les défunts. La « Vierge au Manteau » où l’on verra Marie abriter sous son manteau toutes les femmes et tous les hommes qui consentent à se mettre sous sa protection ; de façon privilégiée tous les enfants de son Fils par le baptême, mais le manteau ne se renferme pas sur les baptisés, il reste ouvert pour tous les hommes de bonne volonté quels que soient leur origine, leur pays, leur culture, et qui veulent se mettre sous la protection de Marie. En mettant cette sculpture dans l’Église, nous pensons que ce symbole de la « Vierge au Manteau » parle à tous les hommes de notre temps quelles que soient leurs origines.
Tous nous avons besoin d’une mère dans la croissance de notre vie humaine, de même au niveau spirituel, la Mère de Jésus est notre Mère dans l’ordre de la grâce. « Femme voici ton fils », dit Jésus à sa mère, à la croix.
« Cette créature unique Vierge et Mère, écrit l’un de nos frères dans la vie monastique cistercienne, le bienheureux Guerric d’Igny, qui se glorifie d’avoir mis au monde le Fils unique du Père, étreint avec amour son même Fils unique en tous ses membres, et ne rougit pas d’être appelée la Mère de tous ceux en qui elle voit son Christ déjà formé ou en train de se former ».
Rendons grâces en ce jour d’avoir été appelés à avoir la connaissance de Jésus, à avoir la connaissance de Marie, à pouvoir lui confier nos vies, nos souffrances, nos espérances, nos joies, tous ceux que nous portons dans notre cœur, qu’elle nous conduise dans la paix vers la vie éternelle,
Amen!