Chers Frères et Sœurs
Avec la fête du Christ-Roi s’achève solennellement chaque année le déroulement liturgique du Mystère du Christ. Cette fête a la particularité de célébrer par anticipation le dernier grand évènement de l’histoire de l’humanité qui se produira à la fin du monde, lors du retour du Seigneur.
Bien qu’elle n’ait pas encore eu lieu – et c’est là, la belle exception – nous pouvons la célébrer liturgiquement à la faveur de l’écoute orante de la Parole de Dieu et l’exercice des vertus théologales, surtout en ce jour celle de l’Espérance, puisque la Parousie est avant tout l’objet de l’Espérance pour les Chrétiens. On découvre bien là, l’expression du pouvoir extraordinaire qu’a la liturgie de l’Église, de permettre d’effectuer par la médiation de l’Esprit, la participation au Mystère total du Christ, et ainsi comme par de grands sauts à travers le temps, de se rendre présent tout autant à des faits passés qu’à d’autres futurs.
Sans aucun doute convient-il aussi de penser (puisqu’il s’agit aujourd’hui du rassemblement universel à tous les hommes et femmes de bonne volonté) à ceux et celles qui ont vécu sur cette terre dans l’ignorance d’un Salut, mais qui en droite conscience, désirent, dans leur nuit, une rétribution de justice après la mort ; ne serait-ce que parce qu’ils ont pris la vie au sérieux et se sont efforcés d’entretenir autour d’eux de bonnes relations sociales. Ils peuvent considérer alors cette fin comme le terme d’une vie inespérée, mais toute remplie de désirs ineffables, qui témoigne qu’une réalité finale supérieure les comblera !
Or, cela ne peut pas être autre chose pour eux que l’éclosion du Royaume déjà secrètement commencé en Église, depuis la résurrection et l’ascension glorieuse du Seigneur auprès de son Père ; mais combien d’entre eux, du fait de leur extériorité plus ou moins consciente à ce Mystère, pourront-ils le connaitre ? Jésus parait justement, en ce dimanche, y répondre simplement par l’amitié manifestée lors de situations pénibles partagées.
En ce Dimanche de clôture de l’année A, nous est présenté le grand tableau du « jugement dernier » où le Seigneur apparait comme un Roi siégeant sur son trône de Gloire devant l’immense foule des nations. Il opère comme malgré lui, le grand tri entre bons et mauvais, à partir de la mise en exergue du seul mais double commandement de l’amour de Dieu et du prochain, et dont la réponse est proposée à tous les hommes.
En la circonstance, ce double commandement de la Charité se trouve ici parfaitement unifié en la personne du Christ, qui seul peut tenir cette place de juge, étant Lui-même à la fois Dieu et homme. En cela, il nous oblige à considérer juste et bon son partage, entre le côté droit et le gauche, même s’il apparait un peu trop exclusif dans leur rétribution respective.
Même si Jésus ne nous parle pas ici sous forme de parabole, Il parle encore en images. Cela n’offusque en rien le critère de vérité discriminateur qui est la mise en pratique de ce double commandement qui ne fait qu’un dans le Mystère du Christ, et se trouve désormais étendu au-delà des limites de l’Église.
Le motif décisif qui se dégage de ce jugement solennel provient que le Roi glorieux se sent solidaire des plus petits de ses frères. Car bien que nus, étrangers, affamés ou assoiffés, sans abris, malades ou prisonniers, ils n’en sont pas moins tous, des êtres humains créés à l’image de ce Fils.
N’est-ce pas précisément, par, et dans cette solidarité universelle endurée librement, et partagée, que le Christ se fait Roi de l’humanité ? Lui qui a voulu, par amour éprouvé, les situations humaines les plus basses et les plus humiliantes, afin de les transformer toutes !
Voilà ce que tout Chrétien est amené à méditer en ce dernier dimanche de l’année.
La rencontre du prochain misérable se trouve alors « transfigurée en Lui », le Christ ; et il me réjouit alors de voir non plus un étranger mais un frère aimé du Seigneur… qu’il en soit ainsi ! Amen !