Homélie du vendredi 1er novembre 2019

Tous les Saints – Solennité – Année C

Par le Frère Jean-Marie

Le texte de cette homélie n’a pas été relu par le prédicateur – Le style oral a été conservé

 

Frères et sœurs bien aimés, nous fêtons aujourd’hui, en cette Solennité liturgique de la Toussaint, cette réalité mystérieuse, mais bien réelle, des êtres humains qui sont présentement dans la plénitude de la Gloire céleste.

La fête de Tous les Saints oriente notre regard, le regard de notre âme, vers la destinée ultime voulue par Dieu comme Créateur pour l’ensemble de l’humanité, de tout temps et en tous lieux, comme pour chacun des membres de cette même humanité auxquels nous appartenons. La Toussaint est une fête d’espérance, de ce moteur qu’est l’espérance qui nous permet de puiser l’énergie, la force nécessaire, pour avancer d’un pas ferme, déterminé, décidé, sur le chemin de la vie vers le Royaume de notre Père du Ciel.

« Nous avons bien besoin d’endurance » nous dit l’auteur de l’Épitre aux Hébreux, cette endurance trouve sa force dans la vertu théologale d’Espérance. Nous appelons les « vertus théologales » les trois vertus qui sont données directement par Dieu, qui sont infusées dans notre âme… données… comme un sachet de thé dans une tasse. Dieu nous donne ces vertus au baptême : la Foi, l’Espérance et la Charité. Et ces trois vertus nous permettent de toucher Dieu directement à partir du fond de notre être ; l’Espérance est source de Joie. Dans la Foi et l’Amour, nous pouvons exprimer notre Espérance par cette prière qui est un acte : « Mon Dieu, j’espère avec une ferme confiance que tu me donneras, par les mérites de Jésus-Christ, ton Fils, ta grâce en ce monde, et si j’observe tes commandements, le bonheur éternel dans l’autre parce que tu l’as promis et que tu es fidèle à tes promesses ».

Oui, une ferme confiance en notre Père qui nous aime, dont nous sommes les enfants, et qui tient ses promesses comme toute l’Écriture Sainte nous le montre et nous le révèle. Que craindre alors ?

La Toussaint a une double caractéristique : tout d’abord, pour ceux qui sont déjà dans le Royaume, c’est une fête permanente de lumière, de joie, dans la plénitude de la gloire de l’Être de Dieu, de la Trinité. Mais c’est une fête ensemble, tous ensemble !

Il en va de même pour nous, qui sommes en marche, en pèlerinage ; nous tendons vers cette lumière qui nous attire et nous oriente mais nous le faisons ensemble. Tous, ensemble !

Nous pourrions dire que chaque jour est la Toussaint ! Que nous avançons chaque jour vers ce Royaume et cela « tous ensemble » ; nous espérons ensemble. L’Espérance elle-même contribue aussi à faire de nous un peuple : le peuple de ceux qui cherchent Dieu, qui « recherchent la face du Seigneur »… comme on le chantait dans le psaume responsorial : le peuple de Dieu… qui est aussi la Cité Sainte vers laquelle nous allons, la Jérusalem d’en haut qui est décrite dans l’Apocalypse, dans l’Épitre aux Hébreux.

Si l’acte Créateur nous constitue comme une seule humanité avec une même destinée, le Salut en Jésus-Christ nous établit également en une ressaisie comme un peuple, le peuple nouveau, celui qui est recréé par la vie de grâce, par le baptême qui nous purifie du péché et nous ouvre à la vie divine, à la vie trinitaire et qui fait de nous l’Humanité nouvelle recréée dans la grâce divine, qui marche et espère ensemble.

La grâce du Salut nous rejoint personnellement mais nous constitue, en même temps, comme peuple ; un peuple qui n’est autre que le Corps du Christ, pour reprendre l’image de St Paul, dont la Tête est le Christ Jésus lui-même, de qui, et par qui, tout est vivifié, unifié, gouverné, dirigé.

Ce peuple, ce Corps, est aussi une communion. Une communion de chacun avec la Tête, le Seigneur Jésus ; une communion de l’ensemble de ses membres avec cette Tête, avec Dieu ; et une communion de tous les membres entre eux. Une unité !

Cette fête de Toussaint rejoint et réalise un double désir : à la fois la volonté de Dieu de nous aimer personnellement et de façon unique ; mais aussi constituer pour chacun, et en tant que peuple, une relation fraternelle, les uns envers les autres.

Mais en même temps, cette fête montre et réalise ce désir de l’homme inscrit au plus profond de son être ; ce désir de bonheur… de bonheur en relation avec les autres. On ne peut pas être pleinement heureux si l’un d’entre nous souffre. Notre joie sera d’assumer l’autre et de l’emmener avec nous vers cette lumière et cette joie parfaite.

Frères et sœurs, cette réalité profonde, qui est présente dans cette solennité d’aujourd’hui, ravive en nous le désir et le courage de nous mettre en marche à nouveaux frais. Aujourd’hui est un nouveau départ si nous le voulons.

Une remise en route vers le Seigneur ; mieux encore : avec le Seigneur ! Car tout se joue, dans notre vie, sur notre relation personnelle et vivante avec le Seigneur Jésus ; Il est le seul qui ait vécu pleinement les Béatitudes après les avoir énoncées ; Il est Lui-même la plénitude des Béatitudes et Il est la Béatitude…

C’est en fonction de notre lien vivant avec le Christ-Jésus que nous aurons la lumière… et donc l’intelligence, la force… et donc la possibilité de mettre en œuvre, de passer à l’acte… pour accomplir le Bien.

En dehors de Jésus, nous ne pouvons rien faire ! Nous n’en sommes pas toujours convaincus mais l’expérience et les échecs de la vie nous remettent sur ce chemin.

Toute la vie chrétienne, toute vie humaine, trouve sa plénitude, son élan, sa cohérence, sa compréhension, dans ce lien, cette relation avec Jésus source de tout Bien et de toute lumière. C’est le Christ qui éclaire la vérité sur notre être humain et sur l’humanité. Dans cette relation nous découvrons toujours mieux qui nous sommes et le chemin à parcourir ; et cela tout au long de notre vie.

Nous sommes des êtres voulus et aimés par Dieu, dans un Amour fou, dans un Amour unique. Blessés par le péché, nous sommes rachetés par le Christ-Jésus Rédempteur.

Les saints ne sont autres que des pécheurs, des pécheurs pardonnés ; des hommes et des femmes qui se sont convertis. En dehors de la Vierge Marie, l’Immaculée Conception – ou alors de St Jean Baptiste, ou de St Joseph, sanctifiés très tôt par des grâces spéciales – tous les autres, nous sommes appelés à nous convertir et passer des ténèbres à l’admirable lumière divine. Et ce chemin est un chemin de toute la vie, un combat de toute la vie, une vigilance de tous les jours.

Pour nous, tout au long de notre parcours ici-bas, nous avons à plonger notre vie dans le Sang du Christ pour être purifiés, blanchis, par la puissance de son Amour manifesté, et réalisé dans la Passion et sa Croix, et répandu sur l’homme par sa Résurrection et son Ascension.

Cette vérité profonde s’est réalisée pour chacun de nous au baptême ; mais aussi se réalise par le sacrement de Pénitence, et de Réconciliation, qui nous permet d’actualiser cette purification initiale et définitive du baptême ; pour retrouver dans chaque absolution sacramentelle l’élan joyeux, la dynamique vitale, surnaturelle et paisible, de celui, et de celle, qui se sait aimé et qui veut répondre à l’Amour de Dieu.

Ce matin, en cette Eucharistie, en cette Messe, faisons le choix au plus profond de notre être, un choix conscient, libre, amoureux, personnel et communautaire, de suivre le Christ-Jésus sans condition.

Et ce, dans le concret de notre existence, aujourd’hui, dans le présent de notre vie, sans plus attendre, ni faire attendre le Seigneur qui frappe patiemment à la porte de notre cœur, et attend que nous lui ouvrions ; que nous lui ouvrions enfin cette porte que nous sommes seuls à pouvoir ouvrir pour l’accueillir Lui ; accueillir sa Présence et son action en nous.

Alors, nous pourrons vivre et réaliser ce que le Seigneur attend de nous, enfin accomplir notre vie : cette communion vivante avec Lui et ce lien d’Amour avec les autres, tous les autres sans exception.

Et accomplir dans l’Église et pour l’Église, notre Mère, Corps du Christ, Temple de la grâce de Dieu, l’Humanité régénérée, le dessein de Bonté, de Miséricorde, d’Amour, que Dieu veut réaliser avec nous et par nous… mais jamais sans nous.

Historique de nos Homélies