Homélie des fondateurs de Cîteaux – Mardi 26 janvier 2021 – Année B
Par le Frère Jean-Baptiste
Le texte de cette homélie n’a pas été relu par le prédicateur. Le style oral a été conservé.
La fête des bienheureux Pères de notre Ordre de Cîteaux nous convie à nous replonger dans cette période d’effervescence de l’histoire de l’Église marquée par la réforme grégorienne. Faut-il rappeler : la dénomination grégorienne se rapporte non pas au Pape Grégoire le Grand qui écrivit la vie de St Benoit mais à celui de Grégoire VII qui apportât, cinq siècles plus tard, une autorité accrue à la papauté sur les puissants qui dominaient alors le monde occidental déjà pourtant christianisé.
Et c’est aux moines qu’il appartiendra, dans l’Église, d’être prophètes au sens large du terme, pour en actualiser son Mystère proprement eschatologique.
St Robert, le premier de nos Pères, à la tête, illustre bien cette pensée. D’abord, il fut prieur d’un monastère bénédictin, et il n’hésita pas, avec quelques compagnons, à fonder un monastère plus retiré dans les bois à Molesme.
Presque vingt ans plus tard, à cause de l’afflux de vocations, le climat premier changea tant qu’il fut contraint de renouveler une fondation plus conforme à son projet de suivre plus strictement la règle.
Il se retrouve dans une forêt au sud de Dijon, dans un endroit marécageux où poussaient des cistels (roseaux, qui donna le nom de Cîteaux).
Il pourra vivre là plus simplement, dans le silence et la pauvreté, la vie bénédictine.
Pourtant, dix-huit mois plus tard, Robert dut retourner à Molesme, à la demande du Pape, pour y rétablir la paix. Ce fut donc Albéric, son prieur, qui concrétisa le projet en déplaçant le nouveau monastère, comme on l’appelait, dans un lieu plus sain. Il construisit une petite église en 1100, et il mit en œuvre les éléments propres à Cîteaux :
simplicité de la Liturgie ; la pratique régulière du travail manuel ; l’accueil de Frères convers ; enfin, le refus de s’adonner à l’éducation des enfants que la Règle permettait pourtant au détriment du recueillement.
C’est sous l’abbatiale que les moines se revêtirent de la tunique de laine non teinte qui les différenciait des autres bénédictins. C’est Albéric aussi qui mit la communauté encore fragile, sous la protection de la Vierge Marie.
En 1109, à sa mort, ce fut St Etienne, nettement plus jeune, qui lui succéda. Cet anglais avait suivi l’aventure de Robert et d’Albéric dans leur installation à Cîteaux. Il s’efforça de poursuivre leur œuvre déjà bien commencée. C’est lui qui assuma l’organisation de l’Ordre naissant. Et, avec son talent mais aussi le conseil éclairé des premiers Abbés des monastères cisterciens, il structura des liens entre ces abbayes, et ainsi sauvegarda l’unité de l’Observance. Des relations de services s’établirent entre les monastères parfois très éloignés et cela permit de mettre très concrètement en valeur la pratique de la charité, et d’en élargir son ouverture à travers l’Église d’Occident.
On peut dire que l’esprit de Cîteaux s’exerça ainsi à démontrer que la loi, que le Seigneur prescrit à ses fidèles, n’est pas au-dessus de leur force ni hors de leur atteinte ; car la Parole de Dieu peut demeurer dans notre bouche et dans nos cœurs si nous l’aimons véritablement.