Homélie du dimanche 6 décembre 2020 – 2ème semaine de l’Avent – Année B
Par le Frère Jean-Marie
Le texte de cette homélie n’a pas été relu par le prédicateur. Le style oral a été conservé.
Frères et sœurs bien aimés, nous avons tous fait l’expérience de rencontres qui ont marqué durablement notre vie.
Mais nous avons fait, nous faisons encore, l’expérience d’images, même furtives, qui habitent notre cœur, et même, nourrissent notre mémoire, notre imaginaire, notre dynamique intérieure, notre ouverture à la lumière. L’image d’un paysage, d’un monument, d’un tableau, d’une sculpture, l’image d’une personne, qui seulement aperçue ou entrevue même de loin, habite notre esprit et même notre cœur. Car, au-delà et à travers même ce lieu, ce bâtiment, cette personne, nous sommes renvoyés aux symboles qu’ils représentent et vers qui ils nous orientent. Et ce souvenir, cette image, continue à nourrir en nous le souvenir de Dieu ; plus encore, le doux appel qui ne cesse de retentir dans notre âme. Dieu se sert de tout pour nous ramener à Lui ; non seulement pour nous ramener à Lui mais pour que nous demeurions en sa Présence.
Tout conduit à Dieu ; tout peut conduire à Dieu.
Telle est la figure du Baptiste. Mais avec une dimension et une profondeur singulière qui dépassent largement bien d’autres figures et symboles. Car la personne de Jean le Baptiste entre en ligne directe avec le Mystère du Salut, de l’Incarnation à la Rédemption.
Jean est le fruit direct du Don de Dieu fait à ses parents, à sa mère stérile. Il précède (déjà!) de six mois la conception et la naissance du Christ Jésus, son cousin selon la chair.
Pendant que Jésus vivra caché pendant trente ans à Nazareth dans l’humble quotidien d’un village de Terre Sainte, au milieu de la population de Palestine, Jean, lui, vivra ces trois décennies dans la profondeur de la solitude, dans la profondeur du désert. Il est envoyé à Israël pour annoncer et pour préparer la venue du Messie (appelé le Christ) et le reconnaître, le désigner dans la Personne même de Jésus : ce Jésus qu’il avait désigné dès le sein maternel.
Le Seigneur, de nouveau, comme son Précurseur, le désignera : Jésus désignera, Lui-même, Jean comme son Précurseur ; et Il ajoutera comme “Elie qui doit revenir à la fin des temps”, comme “le plus grand des prophètes” et “le plus grand des enfants de la femme”.
Jean précède Jésus, dans son martyre et sa mort, dans l’obscurité de son cachot, comme les ténèbres qui couvraient la face de la terre lors de la mort en Croix du Christ Jésus.
Si Jésus passe pour certains, selon ses propres paroles, pour un glouton et un ivrogne, un ami des pécheurs et des publicains… en plus il mange avec eux !
Jean, lui, “est vêtu de poil de chameau, avec une ceinture de cuir autour des reins, et il se nourrit de sauterelles et de miel sauvage”, dans l’austérité et le profond silence du désert de Juda.
La figure de Jean pourrait se concentrer comme en un triple dyptique :
tout d’abord l’annonce de sa naissance par l’ange Gabriel, et la joie de sa venue au monde, en symétrie avec la longue et pénible attente de ses parents, Elisabeth et Zacharie.
Mais aussi cet Amour de Dieu, cette soif de l’absolu… cette soif de l’absolu de Dieu qui le nourrit au désert ; et en parallèle, l’attente fervente des pauvres du Seigneur qui prient, qui crient, qui espèrent en Dieu leur Sauveur.
Enfin, sa manifestation à Israël dans la douceur et la fermeté de celui qui parle au Nom de Dieu, et qui unit Amour et Vérité (comme nous disait le psaume 84 tout à l’heure)… qui unit Amour et Vérité, et qui attire les foules, en symétrie au creux même de son dépouillement et de son oubli de soi pour servir la mission qu’il a reçu – et non pas se servir – pour servir la mission qu’il a reçu d’En Haut.
Jean nous conduit en cet Avent. Il annonce encore et toujours ce Jésus, qui lui était si proche et si lointain ; ce Jésus, Messie attendu en Israël et Sauveur espéré par beaucoup.
Jean continue d’annoncer la venue de Jésus et le désigne encore comme le Maître à suivre, sans crainte ; comme l’Ami à écouter, toujours proche et qui donne la joie ; comme l’Agneau de Dieu qui porte et qui enlève le péché du monde, et le péché de chaque homme ; comme Celui sur qui repose l’Esprit Saint et baptise dans ce même Esprit Saint.
Frères et sœurs bien aimés, que nous vivions en retrait du monde, comme les moines, ou bien, pour beaucoup nous soyons plongés dans la mer agitée et mouvante du siècle, Jean le Baptiste nous rappelle et nous désigne en tous temps, le Christ Seigneur : Celui que nous devons suivre : Jésus !
Puisse-t-Il, ce doux Seigneur, par l’intercession de ce même Jean, et de sa Mère Marie, demeurer sous les yeux de notre âme, habiter notre cœur et notre esprit, et nous communiquer son Esprit de Vie.
Amen!