Homélie de la Saint Benoît, dimanche 11 juillet 2021. 15ème Semaine du Temps Ordinaire – Année B

Par le Frère Jean-Marie

Le texte de cette homélie n’a pas été relu par le prédicateur. Le style oral a été conservé.

 

Frères et sœurs bien aimés

Nous fêtons aujourd’hui St Benoit, Benoît de Nursie dans la région de Rome, qui est allé vers le Seigneur le 21 mars 547. Alors pourquoi fêtons-nous aujourd’hui le 11 juillet, St Benoît ?

Quand un chrétien a été fidèle aux promesses de son baptême – qu’on appelle dans l’Église des saints mais tous les baptisés sont saints par le baptême et sont appelés à se conformer à ce qu’ils sont – et bien, ces hommes et ces femmes, ces enfants, ces vieillards, sont qualifiés de saints et le jour de leur mort physique, biologique, on parle de leur Transitus : ils ne meurent pas !

Au fond, la mort de l’âme n’existe pas. Nous passons d’un état à l’autre. L’âme est immortelle et en fonction de ce que nous avons vécu, l’âme va dans la gloire de Dieu ou se sépare définitivement de Dieu ; ou dans certains cas, il y a un institut de beauté pour les âmes qu’on appelle le Purgatoire, pour les préparer à la charité parfaite.

Donc, le 21 mars est le Transitus de St Benoît ; mais le 21 mars tombe toujours en Carême et je pense que les moines ont changé la date ; la date du jour de la translation de ses reliques qui sont arrivées à st Benoît sur Loire, près d’Orléans.

Benoît… Ce nom de Benoît veut dire « béni », bénédiction. Benoît est un homme béni, un homme de bénédiction, à un double sens ; tout d’abord, il a été béni : Dieu lui a voulu du bien, comme Dieu veut du bien à chacun et chacune d’entre nous. Dieu nous bénit ! Et Benoît a été béni et son nom signifie cette vocation et cette mission qu’il a reçue.

Dans la Bible, le nom renvoie toujours à une vocation et à une mission. Et on pourrait dire, par analogie, dans l’histoire de l’Église aussi, le nom renvoie à une vocation, à une mission. Le nom renvoie au Don de Dieu. Ce nom qu’on reçoit au baptême ou du moins donné par les parents.

Benoît est donc un homme béni ; ce qu’il l’a appelé à sa conversion personnelle, à ce retournement, cette métanoïa, pour abandonner la vie sans finalité qu’il avait à Rome, afin de suivre Jésus dans le désert tout d’abord, puis ensuite dans une vie cénobitique, c’est-à-dire une vie avec des frères pour servir Dieu.

Benoît a été béni, mais par le fait même, Benoît est un homme de bénédiction, c’est-à-dire : qui veut du bien aux autres, qui bénit les autres. Et ce mouvement a été très fécond chez lui puisqu’il y a des milliers de moines et de moniales, bénédictins, bénédictines, cisterciens, cisterciennes, à travers le monde et à travers les siècles.

Benoît bénit. Mais il bénit aussi tous les hommes.

 

Chaque chrétien qui vit en conformité avec son baptême, et revient sans cesse, même s’il tombe, à cette nature même du baptême qui est la sainteté, qui est la participation même à la vie de Dieu, la vie surnaturelle dans l’âme. Et là, l’âme peut mourir non pas en soi mais peut avoir une mort spirituelle due au péché qui sépare de Dieu. En se jetant dans la miséricorde de Dieu, dans le sacrement de pénitence pour les chrétiens, l’âme est renouvelée, ressaisie, pour vivre à nouveau dans la dynamique baptismale.

Benoît, un homme qui est béni, un homme qui bénit et qui nous appelle à notre tour à recevoir la bénédiction de Dieu, à accueillir la Parole de Dieu.

Frères et sœurs, sommes-nous ce matin prêts à recevoir la bénédiction de Dieu ? Demandons à l’Esprit Saint d’ouvrir les portes de notre cœur, les fenêtres de notre maison, afin que le soleil divin rentre en nous et nous purifie, nous éclaire, nous réchauffe. Nous sommes invités à être des hommes et des femmes remplis de la Présence de Dieu… tout simplement des chrétiens ; et à notre tour d’être des canaux de la grâce.

La grâce ne nous est pas donnée in fine pour soi-même mais pour être en communion avec Dieu et les uns avec les autres ; ce sont les deux premiers commandements : « Tu aimeras le Seigneur ton Dieu de tout ton cœur, de toute ton âme… et tu aimeras le prochain comme toi-même ». Et Jésus va encore plus loin, Il nous dit : « Aimez-vous les uns les autres comme je vous ai aimés »… sur la Croix… l’Amour est toujours crucifié, sinon c’est un hédonisme, on recherche notre plaisir. Le plaisir n’est pas mauvais en lui-même mais la recherche effrénée du plaisir est une voie sans issue, une voie de perdition qui nous détourne du don de soi qui est la qualification de la vie humaine et de la vie chrétienne.

Nous sommes donc invités à être bénis, à recevoir la bénédiction, à être des hommes et des femmes ouverts, et aussi à bénir les autres.

Et de manière concrète, Benoît l’a vécu avec un double moyen : le moyen de la prière et du travail.

Benoît était un homme de prière ; prier n’est pas réservé aux moines ! Jésus nous dit : « Priez en tout temps » ; et St Paul nous invite à prier en tout temps, c’est-à-dire à avoir ce lien avec le Seigneur. La prière est une relation de Dieu avec nous et de nous avec Dieu. Ce n’est pas un monologue… je ne me parle pas à moi-même sinon c’est une méditation, ou je réfléchis sur ma vie, mais ce n’est pas une prière en soi. La prière suppose l’altérité, je m’adresse à quelqu’un, et ce quelqu’un, c’est Dieu, c’est Jésus, c’est le Père, c’est l’Esprit Saint, c’est la Trinité.

Benoît était un homme de relation avec Dieu. Et cette relation s’est établie à travers une Alliance, c’est-à-dire la relation est toujours personnelle, elle est toujours qualifiée. Dieu nous aime personnellement et nous aimons Dieu personnellement ; et nous répondons à notre vocation, tel que nous sommes !

Nous sommes tous unique dans l’histoire de l’humanité. D’ailleurs, il y a un signe physique : les empreintes digitales ; chaque être humain a des empreintes digitales uniques ! Nous sommes sept milliards trois cents millions sur la planète, il n’y a pas deux empreintes digitales identiques.

Donc, nous avons une singularité mais encore plus profonde en notre âme (il ne s’agit pas simplement des lois).

Nous sommes invités à répondre, à faire de notre vie un chef d’œuvre, une œuvre d’art, aux yeux de Dieu, afin de répondre au « pourquoi » Il nous a créés, et à notre éternité à laquelle nous sommes appelés après notre mort physique, biologique… mais qui n’est qu’une étape, nous sommes en transit. Quand quelqu’un change d’avion, on ne dit pas qu’il est mort… on dit qu’il est en transit à l’aéroport… Bien, dans notre vie nous avançons vers cette destinée finale.

Prière personnelle, prière communautaire qu’on appelle l’Opus Dei, l’Œuvre de Dieu, la liturgie, les moines ont sept offices par jour, plus la Messe.

Mais est-ce qu’ils travaillent ? Le travail n’est pas un pensum où « il faut travailler » ; le travail qualifie un être humain. Nous sommes appelés à la suite de Benoît à apprécier le travail. Le travail humble, simple, qui ennoblit la vie humaine, qui la qualifie. Le fait de travailler ennoblit la vie d’un homme.

Le travail n’est pas simplement l’aspect de pénibilité (qui est tout à fait réel et qui nous fait participer à la Passion du Christ pour le Salut des âmes) mais aussi est une construction de soi-même, un service de Dieu, une collaboration à l’œuvre de Dieu et une collaboration à nos frères en humanité. Nous sommes tous solidaires les uns des autres. Être assisté est tout à fait louable et éthiquement noble si nous sommes malades, handicapés, âgés… mais rester sans travailler et vivre d’allocations simplement parce que nous sommes frappés par un excès de paresse, est un péché ! Et nuit à la vie sociale.

Nous sommes invités à retrouver le goût du travail, l’amour du travail, pour se qualifier. Il n’est pas question d’avoir d’économie ou d’aspect financier mais de retrouver le pourquoi du sens du travail, afin de qualifier notre vie et de nous servir les uns les autres… et d’avancer.

Benoit a pris ce chemin du travail pour servir ses frères, pour construire une vie humaine et communautaire, et pour servir l’Église, servir la société. Le travail, c’est pour ça : servir le bien commun.

Nous sommes invités donc à sa suite, à vivre une vie de prière selon notre état, une vie de travail selon notre état, notre âge. Et tout cela dans une vie en commun ; Benoît a vécu une vie cénobitique avec des frères pour manifester cet amour fraternel de charité.

Alors, frères et sœurs, soutenus par la prière de ce grand moine, dont au fond nous savons peu de choses en soi (au VIème siècle, il n’y avait pas trop de biographies, au sens actuel du terme ; nous avons la vie de St Benoit écrite par St Grégoire le Grand mais quelques années après), nous sommes invités à vivre de cette dynamique de notre vie baptismale que nous avons reçue ; et pour nous, moines, d’être fidèles aux vœux qui nous permettent de mettre en pratique, de vivre, l’évangile. La vie évangélique n’est pas au-dessus des nuages, nous sommes invités à vivre notre vie de chrétiens de manière très concrète : dans le célibat, dans la vie familiale, dans le veuvage, dans la séparation ou dans la vie consacrée, sacerdotale, monastique, etc…

Et nous sommes invités à nous donner entièrement afin de répondre à l’appel de Dieu. Répondre  à l’appel de Dieu avec des frères et des sœurs, à travers une vie de prières et de travail simple, de services.

Tout cela nous conduit à une unité de vie. Nous sommes appelés à unifier notre vie pour la gloire de Dieu et le Salut du monde ; et pour servir avec fidélité et modestie la gloire de la Majesté divine.

Amen !

 

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