Homélie du dimanche 26 juillet 2020 – 3ème Dimanche de Carême – Année A
Par le Frère Jean-Baptiste
Le texte de cette homélie n’a pas été relu par le prédicateur. Le style oral a été conservé.
Frères et sœurs,
Pour qui connait un peu l’évangile de St Jean, cet admirable échange de Jésus avec la Samaritaine en plein midi rappelle le dialogue nocturne inachevé au chapitre IIIème, qui précède ce chapitre, que Jésus eut avec Nicodème.
Il affirmait alors que si l’on n’est pas né de l’eau et de l’Esprit, on ne peut entrer dans le Royaume de Dieu.
Le dialogue avec la Samaritaine pousse plus loin l’explicitation du mystère fondamental de la naissance nécessaire d’eau et d’Esprit, qui veut dévoiler le sens mystérique de notre baptême. N’oublions pas que ces dimanches de Carême servent à l’instruction des catéchumènes qui doivent progresser dans l’initiation aux Mystères chrétiens de l’Alliance nouvelle : celle de la vie dans l’Esprit.
Alors qu’Il remontait de la Judée pour retourner en Galilée, Jésus et ses apôtres étaient obligés de traverser la Samarie. Fatigué par la route, Jésus s’arrête près du puit, connu par la tradition comme celui du patriarche Jacob (Jacob y venait abreuver sa famille et ses bêtes) ; et c’est là qu’Il va rencontrer cette femme de Samarie qui vient en portant sa cruche : aussi Jésus peut-il lui demander de l’eau à boire.
Celle-ci, qui a le sens des convenances, s’étonne qu’un juif lui adresse la parole et lui demande un pareil service, mais celui qui connait les cœurs a décelé chez elle, une âme en quête de vérité.
Alors qu’elle semble s’éxécuter, Jésus l’élève au niveau de la conversation en situant sa demande d’eau dans un contexte religieux.
« Si tu savais le Don de Dieu, et qui est celui qui te parle… c’est toi qui lui aurait demandé à boire et t’aurait donné l’eau vive ».
Bien qu’elle ne saisisse pas bien ces paroles, paroles paradoxales, puisque le puit est profond… elle est émerveillée par leur beauté, en sorte qu’elle interroge Jésus à la manière d’un maitre : « Rabbi, serais-tu plus grand que notre père Jacob qui a foré ce puit ? »
À quoi Jésus ose répondre : « Tout homme qui boit de cette eau n’aura jamais soif. Cette eau deviendra en lui source jaillissante de vie éternelle ».
Stupéfaite de cette possibilité si prochaine, la femme naïvement demande qu’il en soit ainsi.
« Donne-la moi cette eau, Seigneur ! »
Jésus ne dit pas non, mais l’arrête sur la réalité de sa vie désordonnée, ce qu’elle ratifie humblement. Pourtant en proclamant Jésus « prophète », elle désire en savoir plus sur le grand problème qui la préoccupe depuis toujours : ce désaccord ancestral qui règne entre les juifs et les samaritains sur le lieu de l’adoration à rendre au Dieu unique d’Israël. Question importante, s’il en est, et combien encore actuelle dans nos dialogues inter-religieux.
Jésus ne craint pas de lui exposer la vérité : « le Salut vient des juifs ». Et même, Il en arrive à lui révéler que « l’heure est venue d’un changement de culte ».
Car c’est Lui le Messie attendu qui vient transformer le culte et accomplir ce que faisait en figure le Temple de Jérusalem.
Commentant ce passage, St Augustin remarque : « Jésus, Verbe tout puissant, est apparemment épuisée à l’heure de midi ; cela ne correspond-il pas à celle de la Croix au moment où il cria « j’ai soif ! ».
Oui, déjà, Jésus enveloppe de son amour la profondeur de ce cœur de samaritaine enténébré, obscurci par le péché, mais habité déjà du grand désir que la vérité se fasse dans ce monde déchiré.
Oui, déjà, Jésus veut se révéler à elle comme la Source et le puit nouveau d’où s’écoule l’eau vive de l’Esprit, source inépuisable du Don de Dieu.
Il est celui qui délivre l’Esprit Saint en communiquant le pardon de Dieu et en transfigurant toutes les formes de piété.
Désormais nos actes les plus ordinaires que nous, baptisés, posons devant Dieu dans sa lumière, deviennent de véritables rituels où la grâce transformante agit sur le monde et lui permet alors de faire humblement progresser le Salut et l’avènement du règne de Dieu sur cette terre.