Frères et sœurs bien-aimés, la Parole de Dieu qui nous est donnée en ce deuxième dimanche de Carême, vient nous saisir au cœur de notre vie, dans notre marche de Carême vers Pâques.

Cette Parole nous décrit l’expérience que les apôtres Pierre, Jacques et Jean ont vécue dans cet événement historique de la Transfiguration du Seigneur Jésus. Mais cette réalité vécue vient nous toucher encore aujourd’hui. Nous ne faisons pas de l’archéologie biblique, si utile soit-elle, nous vivons de la Parole de Dieu qui, aujourd’hui, ce matin, en ce deuxième dimanche de Carême, vient nous toucher à l’intime du cœur. Et la transfiguration du Seigneur vient nous toucher aujourd’hui, ici et maintenant.

Si l’efficacité et l’expérience historique qu’ont vécu les trois apôtres, les trois plus proches du Seigneur, est terminée, la grâce de cet événement perdure dans le mystère de la puissance de l’Église qui actualise dans l’Esprit Saint la vie même de Jésus, pour continuer sa vie aujourd’hui et annoncer le Christ vivant, ressuscité, qui veut nous toucher et nous communiquer sa vie. Nous ne sommes pas des passéistes, nous vivons dans le présent, dans l’aujourd’hui de Dieu qui agit ici et maintenant, par et dans son Église, pour guider non seulement le peuple de Dieu, mais appeler tous les hommes à participer à cette vie divine, à cette vie trinitaire.

Ce récit évangélique de la Transfiguration nous manifeste, nous révèle, nous dévoile l’action de la Trinité Sainte. Le Père révèle son Fils, le Fils nous révèle la lumière qu’il est lui-même, et l’Esprit Saint dans la nuée, saisit les apôtres comme il vient nous saisir aujourd’hui. Mais ce récit évangélique nous manifeste aussi l’unité foncière de la première Alliance avec l’Alliance définitive et nouvelle : l’Évangile, qui se résume dans la personne du Christ, de Jésus, vrai Dieu et vrai homme, Messie annoncé ; Lui qui fait la jonction et qui unit en lui la première alliance et l’Alliance définitive puisqu’il en est la source, l’accomplissement et l’efficacité même.

Et c’est bien dans cette alliance, frères et sœurs, que nous sommes appelés à vivre. Depuis notre baptême, ou si nous allons recevoir le baptême, le jour de Pâques, la Vigile Pascale, nous sommes rentrés dans ce vécu avec le Christ Jésus. Cette alliance, déjà manifestée, est décrite dans la première Lecture de cette messe, où Abram qui va devenir Abraham, est appelé par Dieu à rentrer dans une alliance. Cette alliance qui lui promet une descendance, lui qui n’a pas d’enfant, une descendance qui sera aussi nombreuse que les étoiles du cielque le sable au bord de la mer … innombrable. Mais plus encore une alliance qui le met en relation avec Dieu lui-même, et qui va donner une terre ; mais cette terre n’est pas simplement la Palestine, Israël, la terre sainte, c’est bien plus que cela, cette alliance va s’épanouir dans la Personne même du Verbe fait chair, Jésus de Nazareth. Cette promesse faite à Abraham, faite au patriarche, n’a pour but que La vérité, et nous oriente vers le Royaume des cieux, et non pas simplement vers un espace géographique, sociologique, culturel, voire politique.

Le Seigneur nous appelle à une vie surnaturelle ; et le paradis terrestre est définitivement terminé. Le Seigneur ne nous appelle plus à un paradis terrestre, mais à un paradis céleste : le Royaume des cieux : ce pour quoi nous avons été créés. Dieu ne nous a pas appelés à être des jardiniers éternels, il nous appelle à vivre de sa propre vie au sein même de la Trinité : c’est le pourquoi de la création de l’univers et surtout du monde angélique et de l’humanité. Tel est le terminus de notre vie, à chacun et à chacune d’entre nous. C’est la vie du Royaume des cieux qui nous est donnée.

Et donc ce récit de la Transfiguration nous appelle à un sursaut, un réveil pour accélérer notre marche, intensifier notre marche et notre désir du ciel, qui n’enlève rien de notre responsabilité ici-bas et de notre engagement, au contraire, qui le suscite et qui le vérifie. Mais nous n’oublions pas l’orientation ! Quand nous prenons une voiture, en général, on va vers un but … il vaut mieux ! Si nous montons dans un train, c’est pour aller quelque part. Si nous prenons l’avion, c’est pour se rendre vers une destination précise. Sinon nous avons un problème quand même d’orientation majeure … Et donc nous sommes appelés dans notre vie aussi à ne pas perdre le nord, ne pas perdre la boussole ! Et c’est Jésus qui nous donne la lumière pour nous conduire vers le Père ; et il est lui-même cette lumière, comme il est lui-même le Chemin, la Vérité et la Vie.

Oui, frères et sœurs, ce dimanche de la Transfiguration, durant cette marche de Carême, nous appelle à un réveil. Nous sommes un peu comme l’apôtre Pierre : nous somnolons, nous sommes accablés de sommeil. Mais si ce n’était que le sommeil qui est réparateur durant la nuit … non ! Nous sommes parfois endormis, engourdis, engoncés dans notre vie de grâce. Nous sommes un peu paralysés ! Et donc ce récit vient nous apporter la nécessité du réveil, et le réveil lui-même, pour vivre dans la lumière du Seigneur.

Oui, ce récit évangélique de la Transfiguration nous donne de manière efficace, la lumière, la force et la compréhension profonde du « pourquoi » de notre vie, mais aussi des moyens à prendre pour vivre en conformité avec notre finalité.

Nous sommes appelés, en tant que baptisés, à vivifier notre vie baptismale, qui n’est autre que la relation filiale avec le Seigneur.

Nous sommes appelés à vivre vraiment en enfant de Dieu, mais non pas de manière intellectuelle, virtuelle, possible, émue, comme une vérité qui serait extérieure à nous … « que c’est beau … et ça ne change rien à ma vie ! ».

Et donc, nous sommes appelés à vivre dans notre quotidien de manière existentielle, pratique, de cette relation avec le Seigneur. Et aujourd’hui, la lumière du Seigneur Jésus vient nous réveiller pour actualiser cette relation vivante, vivifiante avec Lui. Ne pas être des chrétiens endormis, somnolents, ou distraits (au sens de Blaise-Pascal).

Nous sommes appelés à devenir des hommes et des femmes pleinement actués, développant toutes les potentialités de notre vie et les déroulant tout au long de notre vie, quelles que soient les circonstances de notre vie : la maladie, les accidents, les échecs, mais aussi les joies, les réussites, les bonheurs, et de tout vivre dans le Seigneur, mais de le vivre dans cette expérience de rencontre et de relation, dans la foi et la grâce du Seigneur Jésus présent dans notre vie.

Oui, nous sommes appelés à nous réveiller et à vivre, de passer des ténèbres ou du clair-obscur à la lumière – comme aujourd’hui où le ciel est plus dégagé que ces derniers jours – il doit en être ainsi dans notre âme : de chasser les nuages et la pluie mauvaise du péché afin de vivre dans cette lumière vivifiante du Seigneur Jésus.

Alors que ce soit pour nous la joie de ce jour !

Dans l’office des Laudes ce matin, la Parole de Dieu qui nous était donnée nous disait : la joie du Seigneur est votre rempart.

Alors que la joie du Seigneur soit la joie de ce Carême, la joie de ce jour et la joie de notre vie.

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