Homélie du Dimanche 17 Novembre 2019
33ème dimanche du Temps Ordinaire – Année C
Par le Frère Jean-Marie
Le texte de cette homélie n’a pas été relu par le prédicateur – Le style oral a été conservé
« C’est par votre persévérance que vous garderez votre vie. »
Frères et sœurs bien aimés, en ce dimanche qui s’approche de la fin de l’année liturgique, Jésus interpelle ses disciples pour les aider à discerner les signes des temps et à prendre l’attitude juste face à la réalité.
Tout au long de notre vie, de notre parcours humain, de notre pèlerinage sur terre, nous exerçons un discernement ; c’est-à-dire une clarification d’une situation particulière, ou plus large, pour soi-même ou pour d’autres, et avec d’autres. Cet acte de discernement suppose plusieurs étapes qui permettent d’avancer afin de faire un choix et de prendre une décision et d’appliquer une orientation précise.
Rester dans l’indéterminé entraine nécessairement un état de médiocrité progressive, et à terme, de régression profonde qui peut conduire à une forme de mort. Celui qui ne progresse pas recule !
Reculer au niveau naturel appartient à l’évolution de chaque vie humaine conditionnée par le temps, et donc la vieillesse, la maladie, les diverses limitations de la condition humaine. Mais cette réalité n’impacte pas en soi, l’avancée de la vie de grâce et même peut devenir élément fécond et dynamisant pour une progression : l’homme intérieur grandit tandis que l’être extérieur tombe en ruine.
Par contre, reculer au niveau du lien avec le Seigneur et de la relation personnelle avec lui, conduit à un éloignement du rayonnement du soleil de justice qui apporte et donne la vie. Couper les racines d’un arbre n’entraine pas sa disparition immédiate mais certaine à long terme.
Il en va de même pour notre âme et notre vie dans l’ordre de la grâce.
La première étape du discernement est de se mettre sous le regard de Dieu dans un abandon complet, comme une harpe aux cordes bien ajustées qui attend que le grand musicien arrive pour jouer sa partition. C’est-à-dire d’être disponible à l’action de Dieu et correspondre à sa grâce, quelles que soient les demandes qui nous sont faites. De ne pas mettre de condition, d’être cohérent et loyal.
La deuxième étape du discernement est de faire un état des lieux, un inventaire ; un inventaire avec précisions des éléments, des instruments, des modes, des acteurs, des caractéristiques, afin de mettre tout ce contenu dans la lumière et le crible du discernement ; puis à peser la valeur et la qualité des éléments en cause et des conséquences ; tout cela en Présence du Seigneur dans la paix, la sérénité.
Il est nécessaire aussi de consulter, de demander conseil à quelque personne avisée dans la situation précise, et surtout d’être accompagné par une personne spirituelle qui nous aide à faire une synthèse de tout cela et de nous aider à nous orienter. Puis, dans la prière, la lecture méditée de la Parole de Dieu, la vie sacramentelle : la confession et l’Eucharistie, de percevoir la réponse du Seigneur au fond de notre conscience, cette conscience éclairée par les conseils, le bon sens élémentaire, la prudence naturelle et surnaturelle… tout cela éclairé et fortifié par la grâce de Dieu.
Alors, la personne peut faire un choix. Un choix profond. Et prendre l’orientation voulue par Dieu avec certitude. Cette volonté de Dieu pour elle, telle que la personne le perçoit au fond de son être. Dans ce cas-là, nous sommes sûrs de faire la volonté de Dieu. Et même si nous commettions une erreur, nous ne commettrions pas un péché. Et Dieu rattrape tout : s’Il rattrape les grands péchés… peut-Il rattraper certaines erreurs involontaires.
Lorsqu’il s’agit des fins dernières – de ce qu’on appelle l’eschatologie – nous pouvons être conscients, et prendre conscience dans notre discernement, que le monde a eu un commencement et aura une fin, c’est une certitude humaine évidente. Plus encore, la révélation divine nous dit que le monde a été créé, et continue d’être créé, par Dieu dans sa Sagesse et son Amour. Et qu’il aura une fin qui sera donnée par le Seigneur, lui-même, avec une récapitulation de toute l’histoire humaine dans la lumière de la vérité et de la justice.
Le temps présent, le temps où nous sommes, est le temps de la miséricorde qui est toujours proposée à tous et à chacun, quelle que soit sa situation et ses chutes (même à répétition)… et ce jusqu’au dernier instant du moment de notre vie, jusqu’au grand passage où une dernière fois, le Seigneur Jésus nous proposera d’aller vers la lumière ou la vie, ou de s’enfoncer définitivement dans les ténèbres.
Nous serons appelés à choisir pour toujours. Tel est le donné de la révélation divine.
Lui, le Seigneur, nous appelle à la vie, à la lumière, à l’amour, au bonheur, au bonheur sans fin : c’est pour cela qu’Il nous a créés, qu’Il nous appelle. Mais les Paroles du Seigneur Jésus nous permettent aussi de poursuivre le discernement avec les avertissements qu’Il ne cesse de nous donner dans l’Évangile, de nous prodiguer par Amour. Il veut notre bien. Non seulement temporel mais éternel.
Mais pour atteindre ce bien définitif dans sa plénitude et arriver au terme, il y a un chemin à prendre, à parcourir, une orientation à opérer, et à maintenir : comme un bateau qui avec le sextant ou le satellite, permet de maintenir le cap vers le port où il veut aller. Et ne pas partir à la dérive ou aller au pôle Nord alors qu’il veut aller au pôle Sud !
Nombre de signes, décrits par le Seigneur dans l’Évangile, se sont produits tout au cours de l’histoire humaine ; et se renouvellent dans le temps de différentes manières : les guerres, les persécutions, les soulèvements, tremblements de terre, les épidémies, etc. Tout cela se répète.
Mais à la fin, il y aura comme une intensité unique de ces phénomènes jusqu’à la l’apparition dans la gloire du Seigneur Jésus, que l’on appelle la Parousie, suivie du Jugement Dernier qui n’est pas la cour de cassation pour revoir le dossier… mais qui est simplement la mise en lumière du vécu de chacun et de chaque peuple.
Chaque être humain est jugé – ce qu’on appelle le Jugement particulier – au moment de sa mort.
Il y a un écart entre la mort immédiate et ce passage définitif où Dieu fait toujours miséricorde, propose toujours sa miséricorde.
C’est pour cela que nous sommes invités à prier pour les défunts ou les agonisants, auprès des mourants dans les hôpitaux, ou les accidents de voiture.
Mais le Seigneur nous avertit aussi que ce jour surprendra. Comme au temps de Noé ou de Sodome et Gomorrhe : « En ce temps-là, on mangeait, on buvait, on achetait »… on se mariait, on faisait la fête, on vendait, on pensait au profit, à construire notre avenir avec beaucoup d’assurances – et aujourd’hui beaucoup d’assurances-vie ! – sur toute vie… sauf sur la vie éternelle.
Et l’intervention, la manifestation de Dieu, a eu lieu !
Il y a donc des signes, et des signes à répétition, mais aussi une inconnue. Des signes qui peuvent se répéter, et qui se répètent, et la fin qui paraitra « comme l’éclair », nous dit Jésus, l’éclair dans l’orage.
Pour affiner notre discernement personnel et communautaire sur les fins dernières, le Seigneur Jésus nous éclaire en affirmant qu’Il sera avec nous et que nous n’avons rien à craindre en soi.
Qu’Il est avec nous chaque jour jusqu’à la fin du monde ; et que les forces du mal ne prévaudront pas contre son Église, quelles que soient les vicissitudes personnelles, communautaires, ecclésiales, et celles de toute l’humanité.
Dieu n’est pas absent ! Il n’est jamais absent ! Mais toujours présent et agissant.
Le Seigneur nous demande donc la confiance… la confiance en qui ? En Lui !
La confiance en sa Parole, et comme conséquence pratique, la persévérance.
La persévérance est fille de l’espérance !
Malgré les évènements, et les éléments douloureux et contradictoires, la puissance du Christ et la Présence du Christ nous apportent la paix et la force d’avancer, de persévérer envers et contre tout – et parfois envers et contre tous ! – dans une attitude d’Amour envers Dieu et tous les hommes, dans l’attente sereine et joyeuse de la révélation plénière du dessein de Dieu.
« C’est par votre persévérance que vous garderez votre vie.»
Amen !