Homélie du dimanche 19 juillet 2020

16ème Dimanche du Temps Ordinaire – Année A

Par le Frère Jean

Le texte de cette homélie n’a pas été relu par le prédicateur

 

Chers frères et sœurs, l’une des paraboles que nous venons d’entendre, la plus développée dans cette page d’évangile, celle du « bon grain et de l’ivraie », est l’une des rares paraboles dont Jésus donne lui-même la signification.

Et dans l’autre passage des Évangiles où Jésus donne l’explication, les apôtres soupirent à la fin et disent « enfin, enfin, on comprend ce que tu dis !» 

Voilà donc une grande parabole dont Jésus nous donne l’interprétation.

Comme tous les passages de l’Écriture, cette parabole peut être appliquée, nous parle du Royaume des cieux – Royaume des cieux où il n’y aura plus l’ivraie et le bon grain et où il n’y aura que le bon grain – elle nous parle de l’Église qui est cette institution humano-divine ici-bas où le bon grain et l’ivraie sont mélangés. Et cette parabole nous parle aussi de l’âme, du cœur profond de chacun d’entre nous, où nous savons que l’ivraie et le bon grain poussent ensemble. Et que tout le travail qui consiste à faire disparaitre l’ivraie, c’est ce qu’on appelle : le combat spirituel.

Je voudrais si vous le permettez, m’attarder sur la deuxième interprétation, l’interprétation ecclésiale : cette parabole nous parle de l’Église.

Il vient régulièrement à l’esprit de certains chrétiens, que l’institution de l’Église sous toutes ses formes porte une forte responsabilité dans le refus de croire de nos contemporains.

Elle serait, dit-on, « un obstacle à la foi ». Il faudrait donc la livrer au soupçon permanent si l’on veut libérer en elle la charité et la sainteté dans le peuple chrétien.

Il serait trop facile de faire de l’institution de l’Église, le bouc émissaire du péché du corps ecclésial, ou pour le dire de façon plus directe, de notre médiocrité… un peu comme dans la vie sociale, c’est toujours la faute de l’autre !

C’est dans le manque de tension mystique et évangélique que s’enracine souvent le péché, non de l’Église, mais des membres de l’Église.

Disons-le en bref : c’est dans le manque de foi, dans le manque de passion pour l’aventure de la sainteté selon les Béatitudes évangéliques, que se situe ce qu’on appelle « le péché de l’Église », pour autant qu’il y ait péché de l’Église.

Le pape Benoit XVI disait que « l’un des grands problèmes de l’Église actuelle, c’est le manque de connaissance de la foi : (ce qu’il appelle) « l’analphabétisme religieux », qui empêche au corps de l’Église de croitre dans l’unité. »

Oui, frères et sœurs, chacun des membres de l’Église, c’est-à-dire chacun d’entre nous, est responsable de la sainteté de l’Église, qui selon  la belle expression du Concile Vatican II est à la fois : simul sancta et purificanda …elle est à la fois sainte et en chemin de purification.

Nous ne sommes pas chargés de réformer l’Église mais comme François d’Assise et tant d’autres saints, d’y être levain enfoui dans la pâte.

Bon grain et ivraie dans l’Église, oui ! « Telle est la composition de l’Église, nous disait Bossuet au XVIIème siècle, mélangée de forts et d’infirmes, de bons et de méchants, de pécheurs hypocrites et de pécheurs scandaleux. L’unité de l’Église enferme tout et profite de tout. »

Mais ne voir que les péchés dans l’Église serait un regard faussé sur ce qu’est en réalité l’Église, qui,  malgré les péchés de ses membres, demeure pour toujours l’Épouse immaculée du Christ Époux.

Tout dépend du regard que nous portons sur elle.

« Elle est semblable, écrit Balzac, à une vieille décrépie dont le visage porte la marque de ses prostitutions ; mais soudain, la petite vieille se redresse sur ses os, rejeta ses guenilles, grandit, sourit, sortit de sa chrysalide noire, elle m’apparut, poursuit Balzac, blanche et jeune, vêtue d’une robe de lin. »

Pour Balzac, la petite vieille et la jeune fille représentent la double figure de l’Église. Déjà au IIème siècle, un célèbre texte chrétien, qui s’appelle « Le pasteur d’Hermas », décrivait l’Église sous « les traits d’une femme âgée aux traits pleins de jeunesse. »

Oui, frères et sœurs, même si la sainteté et le péché coexistent dans l’Église, ils n’y ont pas la même importance.

Car la sainteté comme Don de Dieu est constitutive de l’Église, de façon inaliénable ; tandis que le péché présent dans l’Église, à cause de ses membres, a vocation à être combattu et ultimement vaincu par la sainteté.

S’il y a opposition dans l’Église entre le péché et la sainteté, il n’y pas symétrie, encore moins mélange.

La Personne de l’Église, nous apparait à la fois virginalement Sainte comme Marie, la Mère de Dieu, et humblement pénitente comme la pècheresse qui arrose de ses larmes les pieds de Jésus. Même si ses enfants peuvent la trahir à certains moments de l’histoire, l’Église reste, dans sa Personne, immaculée… pleurant les péchés de ses enfants.

« L’Église est belle de ses saints ! » écrivait St Ambroise de Milan.

L’Église toute entière est passée dans un Saint.

« Non, ne te sépare jamais de l’Église, écrit St Jean Chrysostome, au IVème siècle, aucune puissance ne possède sa force. Ton espérance, c’est l’Église ! Ton Salut, c’est l’Église ! Ton refuge, c’est l’Église ! Elle ne vieillit jamais, sa jeunesse est éternelle. »

Et le Saint Pape Paul VI, retourné vers le Père en 1978, écrivit peu avant sa mort un texte intitulé « Pensées sur la mort ». Et voici ce qu’y écrit St Paul VI, il s’adresse en ces termes à l’Église :

« Je pourrais dire que je t’ai toujours aimée, et que c’est pour cela et pour rien d’autre qu’il me semble avoir vécu. À l’Église à laquelle je dois tout et qui fut mienne, que dirais-je ? Que les bénédictions de Dieu soient sur toi ! Aie conscience de ta nature et de ta mission ; aie le sens des besoins véritables et profonds de l’humanité et marche dans la pauvreté, c’est-à dire dans la liberté, dans la force et l’amour pour le Christ. »

Oui, frères et sœurs, on ne peut pas aimer le Christ sans aimer l’Église ; et on ne peut pas demeurer vivant dans l’Église sans être saisi par le Christ.

Que cette Eucharistie que nous célébrons maintenant, en soit à la fois le gage et le signe efficace, et la source de notre joie. Amen !

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