Homélie du Dimanche 25 juillet 2021 – 17ème Semaine du Temps Ordinaire – Année B
Par le Frère Jean-Marie
Le texte de cette homélie n’a pas été relu par le prédicateur. Le style oral a été conservé.
Frères et sœurs bien aimés, dans ce passage évangélique, nous voyons comme une synthèse de ce qu’est Jésus dans sa relation au Père et la mission qu’Il a reçue du Père, et la manière dont Il répond au Père en développant, au niveau de son humanité Sainte, tout ce qu’Il peut donner ; c’est-à-dire tout !
Le Seigneur Jésus dans son humanité Sainte est tout entier aux affaires de son Père. Dès l’âge de douze ans, Il était allé au Temple, était resté trois jours ; retrouvé par la suite par Marie et Joseph ses parents. Tout l’intérieur de Jésus, son âme unie à sa divinité, toute son activité humaine, prend sa source dans son Père et retourne au Père.
« Tout ce que je vois faire par mon Père, je le fais ».
Jésus est entièrement orienté vers son Père. Ainsi, Il traduit pour nous, la volonté de Dieu, non seulement en paroles mais en actes. Jésus est la Parole de Dieu. Jésus accomplit ce pourquoi Il est venu sur terre ; la mission que le père lui a confié : révéler l’Amour du Père.
Plus profondément, révéler l’Amour qui est Dieu. Dieu qui est Amour. L’agapè divine. Révéler cet Amour du Père pour son Fils dans l’Esprit Saint ; voilà ce que Jésus nous révèle ; qui est Dieu ? Et en nous révélant qui est Dieu, Il nous révèle qui nous sommes : ses enfants.
Des enfants blessés, désorientés, mais ressaisis par sa grâce, recréés par le Mystère de sa grâce, dans le sacrement de baptême et la foi, et qui nous oriente dans cette filiation divine à l’intérieur même de sa propre filiation divine.
Jésus vient aussi pour nous délivrer du Mal, du péché, du pouvoir de Satan. Il vient nous guérir du péché et tous ses miracles – St Jean parle de signes, il n’emploie jamais le mot « miracle » – tous ces signes sont là pour nous orienter vers la vérité de sa mission : l’Amour du Père que le Père nous transmet par son Fils.
« Comme le Père m’a aimé, moi aussi, je vous ai aimés ; demeurez dans mon amour » dit Jésus.
Si Jésus nous révèle l’Amour du Père, Il nous communique son Esprit et l’Esprit du Père, c’est pour nous appeler à le suivre, nous appeler à nous décentrer, pour demeurer enraciner en Lui, comme dit Paul aux Colossiens – enraciné comme un arbre qui a ses racines ; les chênes verts ont des racines très profondes… les cyprès – demeurer ancrer en Lui : c’est l’Épitre aux Hébreux, nous avons l’ancre (d’un bateau) qui est jetée dans le ciel et le bateau est amarré, non pas au fond de la mer, mais dans le sommet du Ciel. Ancré en Jésus Christ, ancré sur Lui.
Nous sommes appelés à nous occuper des affaires de Dieu. Jésus nous confie ses affaires, les affaires du Père. Il nous confie l’avancée vers le Royaume de Dieu, bien sûr c’est Lui qui agit qui donne sa grâce mais Il compte sur nous. Comme disait St Jean Chrysostome : « Dieu n’a d’autres mains, d’autres pieds, aujourd’hui sur la terre, que les nôtres ! ».
Il nous confie le Salut du monde ; Il est venu apporter le Salut du monde ; Il l’accomplit en toute gratuité mais Il nous appelle à participer à ce Salut par grâce, gratuitement.
Cette attitude, frères et sœurs, ce décentrement, joue sur un pivot. Et quel est ce pivot qui fait basculer d’un côté ou de l’autre ? C’est la confiance ! Faire confiance au Christ Jésus, lui faire confiance en tout temps, en tous lieux, en toute circonstance personnelle, familiale professionnelle, sociale, internationale… lui faire confiance !
Et plus encore, lui faire confiance devant les situations impossibles de la vie humaine : là où nous ne pouvons plus avancer. Là où nos moyens sont trop pauvres.
Devant la foule de cinq mille personnes, Jésus veut réconforter chacun et chacune. Le Seigneur ne s’occupe pas des masses… Il s’occupe des personnes ! De chacune des personnes, de chacun et de chacune d’entre nous.
Chose impossible au regard humain et au calcul humain, aux techniques – cinq mille personnes, quelques pains… même en étant ingénieux, on ne va pas très loin, et, c’est vrai, on ne peut pas ! Jésus nous dit par ailleurs : « Hors de moi, vous ne pouvez rien faire ». Nous n’en sommes pas toujours persuadés ! L’expérience et les échecs cuisants nous le rappellent parfois !
Nous ne pouvons rien faire hors de Jésus. Sauf notre volonté qui nous conduit dans des impasses. Comme le Pape Paul VI répondait à un journaliste qui lui disait : « Mais on peut construire le monde sans Dieu ! »… Il disait : « Oui ! Vous pouvez construire le monde sans Dieu, mais vous le construirez contre l’homme… »
Le Seigneur Jésus va plus loin, Il sollicite ses apôtres, notamment Philippe et André, afin qu’ils fassent l’expérience de se livrer totalement à Lui, une confiance totale ! Jésus n’aime pas les partielles ! Il aime la totalité ! Il aime un cœur intègre ! C’est tout !
De s’appuyer fondamentalement sur sa Parole. Face à la demande, le constat est cuisant puisqu’il n’y a que cinq pains et deux poissons ; ce qui est à noter : qui fournit ces cinq pains et ses deux poissons ? Non pas les apôtres … un enfant ! Un enfant qui donne ce qu’il a reçu de sa mère, une mère prévoyante, qui lui a confié cette alimentation pour suivre Jésus pendant les deux-trois jours où il allait le suivre ; et cet enfant remet ce qu’il a ! Et à partir de Jésus, ce don humble, faible, pauvre, va produire un effet magnifique ! C’est ce que Jésus attend de nous ! Jésus s’appuie sur ce peu – ce peu à nos yeux – et à cet acte d’offrande, à ce don des apôtres et de cet enfant. Dieu n’est pas limité par la quantité : c’est Lui qui a tout créé ! Il n’est pas impressionné et impressionnable par la quantité. C’est nous qui sommes, dans notre psychologie humaine, impressionnés par la quantité, l’indéterminé, les chiffres, les millions, les milliards… Un grain de poussière face à l’éternité.
Le Seigneur Jésus nous appelle, aujourd’hui, ce matin, chacun et chacune, à œuvrer pour le Royaume de Dieu.
Frères et sœurs, depuis ce matin, avons-nous pensé à l’avancée du Royaume de Dieu ?
Petit examen de conscience pour chacun.
Certes, l’activité humaine a toute sa valeur et sa nécessité, notre engagement au service de tout être humain et de l’être humain dans toutes ses dimensions. L’amélioration de la condition de vie des autres nous rappelle la phrase que Jésus nous demande (Il s’adresse à nous en Mathieu 25) : « Tout ce que vous avez fait à l’un de ces petits qui sont mes frères, c’est à moi que vous l’avez fait ! » : premier commandement. Deuxième commandement : « dans un même amour ».
Mais une vérité n’enlève pas une autre vérité (et nous vivons dans les paradoxes de notre foi, ce ne sont pas des contradictions, mais des paradoxes). Le but ultime de la mission de l’Église, est le Salut éternel du monde et de chaque être humain en particulier. N’oublions jamais l’adjectif « éternel »… qu’on oublie !
Notre monde manque d’espérance parce que nous n’avons plus de regard transcendant. Tout se limite à la petite semaine. Tout se limite aux congés (forts agréables par ailleurs). Tout se limite à notre pouvoir d’achat. Tout se limite à notre bien-être matériel ; à la sécurité absolue de notre santé ; à la sécurité absolue de notre vieillesse et de notre retraite.
Mais quand pensons-nous à l’éternité ? Quel signe donnons-nous, en tant que baptisé, de notre espérance fondamentale et radicale ? Est-ce que nous sommes des somnolents ? Est-ce que nous sommes anesthésiés face à la vie surnaturelle et submergés par les leitmotiv de la société contemporaine (avec ces belles réalités) mais qui nous raccourcit l’espérance ; qui fait de l’espérance, l’espoir… L’espoir d’avoir quelque chose ! Plus ce grand mouvement de l’âme, de l’être, qui nous fait traverser la mort dans la paix et la joie.
Nous sommes invités à nous dépenser dans notre activité humaine, pour soulager toute forme de pauvreté et de souffrance, et d’améliorer les conditions d’existence des êtres humains, à tous les niveaux (à commencer parfois les nôtres).
Mais nous sommes appelés, en tant que baptisés – en tant que fils et filles de Dieu ; en tant que pierres vivantes de l’Église ; en tant que membres de ce Corps qui est vivant – d’être des acteurs vivants et vivifiants, des canaux de la grâce pour que les autres vivent. Le Salut éternel des autres dépend aussi de nous !
Il faut l’affirmer : le Salut est donné par Jésus de manière absolue et gratuite ; on n’apporte rien au Salut. Et en même temps, il faut affirmer que Jésus, par gratuité, nous appelle à participer à ce Salut, à apporter nos cinq pains et deux poissons ; et l’attitude que nous pouvons avoir, c’est de dire : « à quoi ça sert ? À rien ! Qu’est-ce-que vont changer mes cinq pains et deux poissons dans la situation actuelle ? Rien ! ». Et rien plus rien, ça fait pas grand-chose !
L’autre côté est de s’imaginer qu’on va changer le monde parce qu’on apporte quelques éléments…Non !
Nous devons nous appuyer sur la Parole de Jésus, Lui faire entièrement confiance. Et nous livrer à Lui, pour qu’Il accomplisse dans notre vie par la puissance de sa grâce, la puissance de l’Esprit Saint – qui agit au plus profond de notre âme et qui nous sollicite avec douceur, tout au long de notre vie, de nos journées – pour coopérer à l’œuvre qu’Il veut que nous réalisions, dans la simplicité de notre vie humaine : vie conjugale, familiale, professionnelle ou de retraité. Mais qu’importe ! Nous devons vivre de manière extraordinaire, ce banal ordinaire du quotidien.
Frères et sœurs, demandons pendant cette Eucharistie, la grâce de nous réveiller au niveau surnaturel : d’être des chrétiens éveillés, pas anesthésiés – les anesthésiés, c’est très bon à l’hôpital mais en dehors de l’hôpital, c’est très dangereux – nous sommes invités à être pleinement vivants pour coopérer à la grâce de Dieu ; Jésus compte sur vous, sur nous, sur chacun d’entre nous, pour le Salut de nos frères.
Aujourd’hui, acquiesçons à son appel et par nos lèvres, notre cœur et toute notre vie, offrons-nous au Seigneur pour réaliser ce pourquoi Il nous a créés, personnellement.
Amen !