Homélie du Dimanche 3 Novembre 2019
31ème dimanche du Temps Ordinaire – Année C
Par le Frère Jean
Le texte de cette homélie n’a pas été relu par le prédicateur – Le style oral a été conservé
Chers frères et sœurs, Zachée était petit ; et ce fut une chance pour lui. Ce l’est aussi pour nous.
Petit de taille, il dut monter sur un arbre pour voir Jésus ; mais petit aussi dans le peu d’estime que ses concitoyens avaient à son égard : Zachée, le collecteur d’impôts, donc l’homme « vendu » au pouvoir de l’occupant romain.
Mais être petit fut aussi sa chance. St Ambroise fait remarquer que Zachée était avant tout petit quant à la foi : il n’avait pas encore vu le Christ ; c’est donc vrai, qu’il était encore petit.
Jésus va enseigner Zachée en le faisant entrer dans une autre petitesse : celle des enfants selon l’Évangile : « En vérité, en vérité, je vous le dis, si vous ne redevenez petits comme des enfants » dit Jésus « vous n’entrerez pas dans le Royaume des cieux ».
Parce qu’il possédait beaucoup d’argent, Zachée pensait qu’il était un « grand » selon les critères du monde ; le pouvoir lui donnait de la taille, une stature sociale !
Mais quand Zachée a rencontré le Christ, il a compris que tout cela n’était que paille. Avec St Paul, il pouvait dire : « Oui, je considère tout cela comme une perte (de la paille) à cause de ce bien qui dépasse tout : la connaissance du Christ Jésus, mon Seigneur ».
Oui, Zachée est entré en possession d’une autre richesse ; désormais, il peut dire : « Je peux tout en celui qui me donne la force » ;(qui me rend fort).
Peu m’importe que l’on se moque de moi, qui suis notable, en la ville de Jéricho ; qu’on se moque de moi parce que je suis monté sur un arbre comme un badaud pour voir passer Jésus Christ.
Peu importe que l’on se moque de moi parce que je fais don aux pauvres de la moitié de mes biens et que je rends quatre fois plus à ceux que j’ai spoliés.
Désormais, le regard de Jésus sur moi et le regard que je porte sur Jésus, m’importent seuls. Avec St Paul, il peut dire encore « Celui qui me juge, c’est le Seigneur ».
Devenant disciple de Jésus, Zachée a trouvé la vraie liberté ; il est libre par rapport au regard des autres sur lui. Cette liberté intérieure qui fait qu’il n’est plus, démesurément, attaché à sa propre personne et à ce qu’on pense de lui.
« Dieu m’a sauvé » dit-il « Dieu m’a prouvé à moi-même. Je n’étais donc pas ce qu’on disait de moi ; j’étais meilleur que ce qu’on pensait de moi. Je suis maintenant ce que Dieu dit de moi en vérité, et cela seul m’importe ».
C’est ici, frères et sœurs, qu’il faut peut-être mettre en garde contre une moralisation excessive de la foi. La morale, ne l’oublions pas, la vie morale, est une conséquence de la foi et non l’inverse. Notre réponse à l’appel de Dieu n’est pas uniquement morale et vertueuse, au meilleur sens du terme… réponse qui risque d’être une petite monnaie de comptable qui coupe ses ailes à la foi. Certes, il faut être moral mais la foi est d’un autre ordre. Comme dit la Lettre aux Hébreux :
« Sans la foi, il est impossible d’être agréable à Dieu ».
Oui, il faut être moral, mais la vie morale est loin d’être toute notre réponse à l’offre de Dieu. Celle-ci est appel au partage de sa vie divine.
À l’origine du changement de vie de Zachée, il y a le regard nouveau que Jésus porte sur lui. Ce regard bienveillant de Jésus sur lui a tout changé ! Il s’est reconnu aimé personnellement par Jésus comme personne ne l’avait aimé jusqu’alors.
Il était « le collecteur d’impôts »… il n’avait pas de nom… il était « le collecteur d’impôts ».
Et voilà que lorsque Jésus le regarde, il devient Zachée. « Je n’étais donc pas ce qu’on disait de moi » s’est-il mis à penser.
Zachée en regardant le Christ, et en étant regardé par Jésus, découvre son vrai visage, son visage d’enfant de Dieu, tel que Dieu l’a voulu dès les entrailles de sa mère.
Oui, frères et sœurs, Zachée nous enseigne que nous ne pouvons découvrir notre vrai visage qu’à la lumière de Celui qui a façonné de ses mains notre visage.
Tous les actes de notre vie découlent de là : de l’accueil que nous faisons à ce Don que Dieu nous fait dès notre conception.
L’évangile de ce jour ne nous en dit pas plus sur Zachée que ce que nous venons d’en entendre. Qu’est-ce qu’est devenu Zachée après avoir rencontré le Christ ? Est-ce qu’il a changé de profession ? Est-ce qu’il a tout quitté pour suivre le Christ ?
Pour ma part, j’ai tendance à penser qu’il a continué son métier de collecteur d’impôts, mais tout avait changé : il ne cherchait plus à s’enrichir sur le dos des contribuables mais simplement à rendre avec équité, comme dira Jésus, « à César ce qui est à César et à Dieu ce qui est à Dieu ». Sans plus.
Mais tout avait changé pour Zachée. Désormais dans sa vie – et c’est là le plus important – Dieu passait avant César ! Il avait entendu la Parole de Jésus :
« Vous avez reçu gratuitement ; donnez gratuitement »
Il était désormais l’intendant d’un argent dont il savait qu’il ne lui appartenait pas.
Oui, Zachée était petit aux yeux des hommes, mais, par sa conversion il est devenu grand aux yeux de Dieu. On serait bien en peine de savoir qui était collecteur d’impôts à Jéricho avant Zachée et qui le fût après lui… comme la pècheresse Marie-Madeleine… comme Mathieu le Publicain… comme le pauvre Lazare… leur nom à eux s’est répandu comme un parfum de bonne odeur à travers les siècles.
Et aujourd’hui encore, comme le nom de Marie-Madeleine, jusqu’à la fin des temps, on proclamera dans l’Évangile le nom de Zachée, le petit collecteur d’impôts monté sur un sycomore, qui s’est laissé toucher par le Christ !
Il reçut avec joie dans sa maison, mais en vérité, c’est lui, Zachée, qui fut accueilli dans la maison de Dieu, c’est-à-dire l’Église. L’évangile proclamera son nom jusqu’à la Parousie, car « Le Salut, aujourd’hui, est arrivé en sa maison, car lui aussi est fils d’Abraham ».
Et parce qu’il est fils d’Abraham, la bénédiction de Dieu repose sur lui. Oui, le nom de Zachée est répandu comme une bonne odeur dans le monde entier.
Amen !