Homélie du dimanche 31 octobre 2021- 31ème Semaine du Temps Ordinaire – Année B

Par le Frère Jean-Marie

Le texte de cette homélie n’a pas été relu par le prédicateur. Le style oral a été conservé.

 

Frères et sœurs bien aimés,

Lorsque nous allons chez le médecin, nous acceptons de recevoir une ordonnance qui prescrit des médicaments ou d’autres examens, afin de chercher les causes de la maladie et surtout de soigner.

Lorsque nous avons un problème technique avec une voiture, un appareil, nous demandons à un technicien un diagnostic afin de remettre en ordre la machine, la voiture pour pouvoir s’en servir.

Lorsqu’il y a une défection dans un bâtiment – et nous parlons en connaissance de cause – nous faisons appel à un architecte, à des ingénieurs, à de puissants ordinateurs qui font des simulations, afin de réparer, restaurer, sauvegarder.

Et nous recevons avec confiance, et nous mettons en œuvre, ce que le médecin nous prescrit ; sinon on ne voit pas très bien pourquoi aller voir un médecin !

Nous demandons au technicien un diagnostic et nous appliquons ce qu’il nous prescrit pour réparer l’appareil, la voiture, etc… et quand nous avons un rapport de mission d’un architecte ou d’un cabinet d’ingénieur, nous mettons en application les travaux nécessaires – le temps et l’argent nécessaires – pour mettre en œuvre tout ce qu’il y a à faire pour garder la maison, la restaurer, la sauvegarder ou l’embellir.

Lorsque Dieu nous parle, nous sommes invités à mettre en œuvre ce qu’il nous dit ! Dieu nous adresse la Parole !

Et si nous faisons confiance au médecin, au technicien, à l’architecte, etc… (si nous nous faisons confiance les uns les autres dans la vie sociale, il n’y a pas de vie sociale sans confiance à l’égard des uns des autres sinon c’est l’implosion sociale, l’anarchie, le début de l’enfer), et bien lorsque Dieu s’adresse à nous, nous sommes, à plus forte raison, priés, invités à agir avec cohérence afin de mettre en application ce que Dieu nous dit, l’ordonnance qu’il nous fait ! Cette « ordonnance », ce sont les « Dix Paroles » qu’il nous adresse ; Dieu nous parle ! Dieu nous adresse la parole ; avec un minimum d’éducation, lorsque quelqu’un nous adresse la parole, on l’écoute !

Mais il ne suffit pas simplement d’écouter, mais d’écouter au sens biblique, c’est-à-dire : on met en pratique. Les Dix Paroles sont des Paroles de Vie, appelées aussi des « commandements » parce qu’il y a une question de vie ou de mort ! Les Dix Paroles ne sont pas des conseils surérogatoires qu’on pourrait appliquer selon l’humeur du jour, selon notre ressenti, selon notre état de vie !

Ce sont des Paroles de vie qui viennent nous guérir : comme certains malades ont des chimiothérapies, des radiothérapies… c’est une question de vie ou de mort. Nous sommes appelés à recevoir la Parole de Dieu qui est une parole de guérison, une Parole de vie, mais elle nécessite une mise en application !

Il ne s’agit pas d’écouter, d’admirer et de rester béat sans rien faire, nous sommes invités à mettre en application cette Parole de vie car c’est pour notre bien. Dieu dit parce qu’il est et parce qu’il veut notre bien temporel et éternel.

Comme le disait le Pape émérite Benoit XVI, il y a « comme un mode d’emploi de l’être humain » et si on fait fi de ce mode d’emploi, et bien nous allons en payer les conséquences parfois mortifères, comme le malade qui ne suit pas les indications du médecin.

Donc, nous sommes appelés à vivre selon Dieu et selon le mode d’emploi de la création et de la rédemption, sinon le monde lui-même se retourne contre l’homme et l’homme se retourne contre son prochain. Les choses sont simples :

ou nous nous ouvrons à la grâce de Dieu et nous vivons dans la beauté de la création et de la rédemption, ou nous nous fermons au profond de notre âme à la vie divine et nous commençons à descendre dans la déchéance spirituelle et humaine, et nous nous engloutissons dans un repli sur nous qui est un système de mort et une forme de suicide collectif.

Dieu nous parle ! Il s’adresse à l’humanité, il adresse ses Dix Paroles qui sont ce que la Tradition de l’Église appelle la « loi naturelle », mais formulée ! Formulée !

Ces Paroles, ces commandements, sont le cadre de vie pour le bonheur de l’homme ici-bas et pour l’éternité. Les commandements, ou les Dix Paroles (les Dix Paroles sont plus expressives, plus profondes, plus vivifiantes), ces Dix commandements signifient et qualifient notre relation avec Dieu et avec nos frères et sœurs en humanité, quels qu’ils soient ! Les Dix commandements sont en fait le protocole, la base, de notre relation avec Dieu et les uns avec les autres : c’est le minimum vital, on pourrait dire !

Le Seigneur nous appelle vraiment à vivre selon les commandements, afin d’être des hommes et des femmes debout tel que le Créateur l’a voulu.

Le Seigneur nous aime et nous appelle à aimer, à vivre de l’amour et dans l’amour ; c’est ce qui qualifie toute vie humaine ! C’est la qualité de notre vie, ce que disait St Augustin : « Ton poids ? C’est ton poids d’amour ! »

L’amour de Dieu ! L’amour de soi ! L’amour des autres !

Ces Dix commandements ont deux secteurs (si j’ose dire) : les trois premiers concernent notre relation avec Dieu et les sept autres, notre relation avec les autres. L’être humain est un être de relation, nous le savons tous, et c’est là où nous avons les plus belles expériences et les plus grands échecs, les plus grandes souffrances. Ce qui est le plus précieux peut être le plus perverti !

Nous sommes donc invités à prendre conscience de l’importance de notre relation, de la relation que Dieu a avec nous et qu’il nous appelle à avoir avec lui ; non seulement sur le plan personnel mais sur le plan familial, communautaire, ecclésial, humain. Mais aussi cette verticalité implique l’horizontalité et est nourrie par cette verticalité afin d’avoir une relation, les uns avec les autres, fondée et issue de cette paternité de Dieu qui fait des uns et des autres, des frères et sœurs en humanité : il n’y a pas deux humanités ! Le club des gens bien et les autres !

Tous nous sommes appelés à vivre des commandements de Dieu, à progresser vers le Seigneur, et à nous ouvrir à la puissance de grâce de Jésus qui épanouit les commandements en disant : « Aimez-vous les uns les autres comme je vous ai aimés ! ».

C’est un degré supérieur encore, ce n’est plus la référence à soi-même mais la référence à la Personne de Jésus, vrai Dieu et vrai homme.

« Avoir » le Seigneur, être en relation avec lui, transfigure notre vie et transfigure notre relation, les uns avec les autres.

Les trois premiers commandements commandent et concernent notre relation avec le Seigneur. « Tu adoreras Dieu seul et tu l’aimeras plus que tout ! » : il s’agit d’un amour de préférence. Jésus ne nous dit pas de ne pas aimer le reste ! Mais un amour qualifié : un amour de préférence. Il y a une hiérarchie de valeurs, une hiérarchie de priorités. La confusion est le règne de Satan, la confusion ne mène à rien sinon à l’angoisse, à perdre tous ses moyens et à ne plus avoir la possibilité de discerner les moyens qu’il faut prendre pour avancer.

Adorer le Seigneur seul.

« Tu ne prononceras pas le nom de Dieu ! »… seulement avec respect. Dans la Bible, le Nom de Dieu renvoie directement à la personne, ce n’est pas simplement employer un nom ou un prénom. Cela renvoie directement à la personne, c’est-à-dire on touche à la sainteté de Dieu. Donc dans le culte divin, dans la prière personnelle, le Nom de Dieu doit être prononcé avec respect, non seulement avec les lèvres mais au plus profond du cœur : de ne pas prendre Dieu à témoin alors que l’on est menteur !

La spiritualité, surtout des chrétiens d’Orient avec la prière de Jésus, répète le nom de Jésus tout au long de la journée pour permettre cette prière continuelle et qui nous met en relation avec Dieu à travers les activités nombreuses et multiples, où nous risquons de perdre un peu le nord durant la journée, et nous sommes invités à redire le Nom de Jésus qui nous habite ; prononcer le Nom de Jésus nous rend présent à sa Présence – lui est toujours présent, c’est nous qui sommes un peu évaporés.

« Tu sanctifieras le jour du Seigneur ! »

Le jour du Seigneur est un jour mis à part, consacré, afin de prendre ce temps pour rendre gloire à Dieu de manière personnelle et communautaire. C’est pour cela que nous sommes rassemblés ce matin ; pour célébrer le jour du Seigneur, et le centre de ce jour, c’est la célébration eucharistique où Jésus vient nous nourrir de sa Parole et se donner à nous au plus profond de notre âme dans le mystère de l’Eucharistie, après avoir participé à l’actualisation de son sacrifice sur la Croix.

Ces commandements orientent notre existence dans notre relation à Dieu. L’aimer ! Et lui seul ! L’aimer plus que tout ! Dire son Nom, prononcer le Nom – et nous pouvons prononcer le Nom de Jésus tout au long de la journée – célébrer le Nom de Dieu ; mettre à part un jour pour prendre du repos pour Dieu, du temps pour Dieu ; prendre la gratuité aussi pour soi, pour sa famille, pour les autres ; avoir du temps pour justement rentrer avec une relation à autrui, une relation gratuite, à commencer par Dieu. Nous sommes appelés à prendre le temps de vivre, il y a un temps pour toutes choses.

Mais cet autre commandement concerne notre relation à autrui. Tout d’abord par ceux qui nous ont donnés la vie. « Honore ton père et ta mère ! ». Nous sommes appelés à honorer nos parents, nos parents immédiats, puis la famille, ceux qui ont besoin de nous en famille.

St Paul dit à Timothée : « Ceux qui ne s’occupent pas de leur propre famille sont pires que les non-croyants, ils ont renié la foi ! »

Avant de s’occuper de ceux qui habitent en Extrême-Orient – il faut s’occuper d’eux mais – il faut s’occuper des voisins et de sa propre famille… comment avoir le mot de charité toute la journée dans la bouche, alors que l’on ne voit jamais son père et sa mère ! Combien de personnes abandonnées dans des Ehpad, et pas loin d’ici qui, le plus cruel, ont des enfants qui ne viennent jamais les voir ! Et ce ne sont pas des cas d’école ! Soutenir ses parents y compris au niveau financier, au niveau matériel, les garder chez soi si l’on peut, du moins aller les voir fréquemment, les soutenir, même s’ils ont perdu un peu la tête, et bien, d’être présent… « Honorer son père et sa mère ! ».

« Tu ne tueras pas ! »

Le cinquième commandement nous fait le commandement de respecter toute vie humaine, et cela sans condition ; nous avons à respecter la vie d’autrui ; respecter les enfants dès leur conception. Il y a les meurtres physiques mais on peut tuer des gens par des paroles ou par des actes (pensons à la pédophilie)… on peut briser des gens pour le restant de leurs jours. Nous sommes appelés à être très attentifs : en se disant « J’ai tué personne ! »

Combien de millions d’avortements dans le monde ? C’est la première cause de mortalité dans le monde, avant toute maladie ! 73 millions par an.

Nous sommes appelés à être attentifs à cela. Non pas à culpabiliser, à accuser les autres… à commencer par soi-même ! Est-ce que j’ai jamais tué quelqu’un par mes paroles ou mes actes ? Pas si sûr que ça ! Même de manière involontaire…

« Tu ne feras pas d’impureté ! »

Nous sommes dans un monde érotisé. Il suffit de se promener dans la rue ou de lire quelques publicités, c’est une agression permanente qui est une dévaluation du monde féminin, qu’on considère comme objet de consommation immédiat et jetable. Nous sommes appelés à travers ce commandement à faire un audit personnel dans notre vie ! Quelle est mon attitude face à l’autre ? Face aux femmes, face etc… comment je considère autrui ? Comme un objet de plaisir, de consommation ? Ou comme un être humain respectable et avec qui je peux avoir une relation humaine tout à fait honorable.

Cela concerne l’adultère, le concubinage, la pratique homosexuelle et les pédérastes – on en parle dans l’Église très fréquemment en ce moment – la pornographie qui fait un désastre colossal dans la population.

Et avec ce silence coupable, on fait comme s’il n’y avait rien… On a fait le silence coupable avec la pédophilie mais sur combien d’autres points on fait un silence coupable, frères et sœurs ? Quand on ne sourit pas avec un sourire ironique pour des sujets aussi graves qui brisent des personnes, qui exploitent des personnes, qui détruisent des vies et qui défigurent l’âme humaine créée à l’image de Dieu.

« Tu ne voleras pas ! »

Nous sommes appelés à avoir une vie honnête, à ne pas voler. Nous pouvons nous interroger sur notre attitude sociale :

profitons-nous de subventions sociales, d’abus de chômage, de perceptions d’indemnités qu’on ne devrait pas avoir, de réductions volontaires d’impôts qui n’ont rien à voir avec le législateur ? Sous prétexte que le gouvernement ne nous plait pas, qu’un tel ne nous plait pas ?

Non ! La justice ! Être droits ! Nous devons nous convertir nous-mêmes, balayer devant notre porte avant d’aller faire des remarques aux autres ; et qu’est-ce qui dans ma vie peut être assimilé au vol ? Pas nécessairement avec des braquages, avec des armes à feu !

« Tu ne mentiras pas ! »

Ne dire aucun mensonge ! Il n’y a aucun motif de mentir ! Jamais ! Nous ne sommes pas obligés de dire toute la vérité, tout le temps à tout le monde ! Il y a des secrets professionnels : le médecin ne doit pas raconter la vie du patient qui a précédé dans son cabinet ! Le notaire ne va pas raconter le dossier qu’il est en train de traiter chez le voisin ! Etc… c’est évident ! Tout le monde n’a pas à tout connaitre sur tout ! Il ne s’agit pas de cacher des crimes. Il est question de respect de la vie d’autrui.

De ne pas mentir : de ne pas porter faux témoignage, y compris dans des procès de mœurs. Ne pas mal parler de son prochain : il est un « coup de langue » qui peut défigurer la vie d’autrui, calomnier son prochain !

« Tu n’auras pas de désir impur volontaire ! »

Oui ! Ce combat intérieur où nous devons ne pas donner crédit à toute pensée impure ! On ne peut pas ne pas avoir de pensées tordues puisque nous sommes malades par le péché et nous sommes tous cabossés. Donc, c’est un combat intérieur ! C’est de ne pas céder à ses pensées mauvaises qui est important et donc d’avoir cette vigilance, de les laisser de côté, de les chasser. Jésus nous dit qu’un homme qui regarde une femme avec désir, a déjà commis l’adultère dans son cœur. Il ne s’agit pas de passer aux actes ! C’est le cinéma intérieur qui doit vraiment changer de film !

Quel regard porte-t-on sur  les autres ? Quel regard d’amitié, de respect, par rapport aux autres ?

Enfin, le dixième commandement : « Tu ne désireras pas de manière injuste les biens d’autrui ! »

La concupiscence sur les biens de ce monde ! La jalousie ! Mourir de jalousie parce qu’on n’a pas la voiture du voisin, la maison du voisin ou les revenus du voisin ou la réputation, etc… d’avoir ce lien avec le Seigneur qui fait que l’on regarde les autres avec gratuité, heureux de ce qu’ils ont et pouvant vivre aussi soi-même avec le Seigneur et cette liberté des enfants de Dieu.

Oui ! Frères et sœurs, ces Dix Paroles sont des Paroles de vies qui nous sont adressées aujourd’hui, à la fois comme un appel où Jésus nous dit : « Lève-toi et marche ! »

Alors, en ce jour, levons nous, faisons ce petit audit sur chacun des commandements qui peut être un peu décapant parfois ; et nous remettre en ordre de marche pour avancer dans la lumière de Dieu et le service de nos frères.

Oui ! Vivre, pratiquer ces commandements pour avoir la Vie. La vie humaine heureuse, lumineuse, ici-bas, et la vie éternelle dans le Royaume de Dieu qui nous est promis par Dieu. Vivre comme le Seigneur le veut !

Vivre comme des êtres humains en vérité !

 

 

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