Homélie du dimanche 9 mai 2021 – 6ème Semaine du Temps Pascal – Année B
Par le Frère Jean-Marie
Le texte de cette homélie n’a pas été relu par le prédicateur. Le style oral a été conservé.
« Comme le Père m’a aimé, moi aussi je vous ai aimés. Demeurez dans mon amour »
Frères et sœurs bien aimés, cette phrase de Jésus pourrait, en quelque sorte, résumer l’ensemble de la vie chrétienne : sa nature, son origine, et sa fin.
Dieu Trinité qui agit, qui œuvre. L’œuvre de Dieu, son économie divine, son dessein. Créateur : le mystère de l’Incarnation, la Rédemption, le mystère de l’Église qui est l’humanité renouvelée et recréée dans la grâce divine, et le Royaume de Dieu.
Jésus est venu à nous ; Il vient constamment à nous ; Il demeure au milieu de nous par le mystère de son Église, par le mystère de sa grâce.
Jésus est l’Envoyé du Père, le Fils bien aimé qui vient à nous : c’est tout le mystère de l’Incarnation : « le Verbe se fait chair et Il a demeuré avec nous »
Jésus, Verbe fait chair, vient accomplir la promesse faite à Israël et dépasser de façon infinie l’espérance de l’humanité, à savoir que l’homme devient Dieu par grâce. La venue du Seigneur manifeste et réalise cet amour du Père pour toute l’humanité.
« Dieu a tant aimé le monde qu’il a envoyé son Fils »
La Personne du Christ-Jésus, ses gestes, ses actions, ses Paroles, révèlent et réalisent, qui est le Père et son amour pour le monde, c’est-à-dire pour chacun de nous.
« Comme le Père m’a aimé »
Cet amour appelé « amour d’agapè » : ce mot agapè a été créé pour désigner l’amour dont les chrétiens reçoivent l’amour de Dieu, l’amour dont Dieu s’aime et l’amour dont Dieu aime le monde ; cet amour, cet agapè éternel du Père pour son Fils dans l’Esprit Saint. Ce même amour qui comble et accompagne l’humanité sainte de Jésus, qui lui permet de poser des actes humains, donc des actes sauveurs, pleinement humains et parfaitement accomplis.
Mais aussi, la réponse d’amour du Fils vers son Père, de Jésus vers son Père, de Jésus vrai homme qui répond, dans et par, toute son humanité – son âme, son corps, sa volonté humaine – à l’amour du Père. En Jésus, toute l’humanité de tous les temps, dans son ensemble, répond à l’appel de Dieu, répond et accomplit parfaitement la volonté de Dieu et son dessein créateur et sauveur. En Jésus, on peut dire que l’homme a répondu à Dieu. Si Adam et Ève ont failli ; si nous, nous tombons ; Jésus a pleinement accomplit la volonté de Dieu. D’où la nécessité vitale d’être uni à Jésus.
C’est de ce même amour que nous sommes aimés par Jésus, dans la personne du Christ, l’unique personne divine du Christ, seconde Personne de la Trinité. Jésus qui a pris son corps de Marie et qui a une âme créée ; Jésus qui est vrai Dieu et vrai homme est l’unique médiateur entre Dieu et l’homme ; l’unique grand Prêtre : nous recevons et nous bénéficions de cet amour du Père pour le Fils, de cet amour de Dieu, et nous pouvons lui répondre, par, dans, et avec, le Christ, comme Dieu le veut, l’attend et comme Il lui plait.
L’humanité de Jésus permet à chaque être humain de recevoir de façon concrète cet amour de Dieu. « Comme le Père m’a aimé, moi aussi je vous ai aimés ; demeurez dans mon amour » : cette phrase de Jésus est source de liberté pour nous, de la véritable liberté !
Nous sommes aimés de Dieu de façon permanente et inconditionnelle. Cet amour vient nous libérer. Il vient nous rendre libre de la prison de l’enfermement sur soi ; libre du regard des autres qui peut nous paralyser, nous tuer ; libre des multiples circonstances de notre vie, de tous les conditionnements qui existent… ils sont réels. Nous sommes aimés quoiqu’il arrive…
De là jaillit notre joie ! La joie de Jésus qui nous est partagée. Joie de se savoir aimés, sauvés, attendus, accompagnés en tous temps et en tous lieux. Joie d’avoir de la valeur et du prix aux yeux de Dieu ; Lui qui nous a créés et sauvés par amour.
Voilà le sens notre vie humaine ; voilà le sens de l’histoire humaine ; voilà le sens de l’acte créateur pour l’humanité. Joie d’être aimés dans ce que nous sommes, et cela suffit ! Non d’abord par ce que nous faisons ou nous possédons (ce qu’on peut avoir acquis). Et cet amour s’adresse à tous sans exception. Cet amour de Jésus nous apporte non seulement la joie mais aussi le fait concret de devenir amis du Christ, frères de Jésus !
Le Seigneur ressuscité s’adressant à Marie Madeleine, le jour de la Résurrection, lui dit : « va dire à mes frères » – Jésus ne dit pas « va dire à mes disciples ; va dire à mes employés ; va dire à ceux qui sont au service, et qui fonctionnent selon mes ordres »…
« Va dire à mes frères »…
Cet amour de Dieu fait de nous des enfants de notre Père des cieux, dans le Fils unique et éternel qui s’est fait homme : Jésus. Cet amour nous donne d’être vraiment des amis de Jésus, ses confidents, ses frères ; Lui qui est le Frère ainé, le Premier de cordée, le Premier né d’entre les morts.
Cet amour nous appelle à porter du fruit, avoir une réponse d’amour. Tout d’abord en écoutant Jésus ; l’amour nous fait écouter l’Autre. En méditant la Parole de Dieu afin de toujours plus connaitre le Seigneur et le visage du Père qu’Il nous révèle. Ensuite, en mettant en pratique ses commandements, l’amour est concret ou il n’est pas réel. Il se manifeste dans le quotidien. Il s’exprime avant tout par la charité fraternelle. Jésus nous dit : « je vous donne un commandement nouveau : aimez-vous les uns les autres comme je vous ai aimés »
« Aimez-vous les uns les autres »
La loi de Moïse, les Dix commandements appelés les Dix Paroles, nous commandait déjà – et non pas nous conseillait – d’aimer Dieu et le prochain. Et cela de manière concrète. Tout d’abord avec le quatrième commandement : « honore ton père et ta mère »… toujours d’actualité ; ensuite, de ne pas tuer… de ne pas commettre d’adultère… ne pas voler… ne pas mentir… ne pas commettre des actes impurs, ne pas désirer ou de calomnier le prochain ou de désirer son bien.
Tout cela, sont des choses concrètes, qui appartiennent déjà à la première Alliance et qui manifestent l’amour du prochain. L’amour du prochain n’est pas simplement le rythme cardiaque qui augmente quand nous sommes émus ! Quel est donc cette nouveauté, ce commandement nouveau ?
C’est dans l’équivalence de la comparaison : « comme je vous ai aimés ».
Cela est vrai de l’amour du Père pour Jésus et de Jésus pour nous : « comme le Père m’aimé, je vous ai aimés » ; et pour l’amour fraternel : « comme je vous ai aimés, aimez-vous les uns les autres ».
« C’est à cet amour que tous vous reconnaitront pour mes disciples » dit Jésus. Ce n’est pas à l’habit religieux, à des grandes croix pectorales, à des ex-voto, à des panneaux, à des cris dans les rues…
Cet amour qui est source de joie, est aussi joie de partager cet amour afin que tous, sans exception, sachent, connaissent, reconnaissent et croient qu’ils sont aimés.
Le premier acte de la mission commence par soi ! Le changement du monde commence par soi-même ! Les grandes idées, les grands changements, sont très beaux, et doivent commencer dans notre propre vie ! Sinon nous sommes dans le régime de l’illusion.
Accueillir et vivre de l’amour du Père, par son Fils, dans l’Esprit Saint. Puis vivre, partager cet amour avec nos proches dans la foi ; et cela dans la joie ! Joie de l’amour partagé et vécu.
« Voyez comme ils s’aimaient » disait-on des premiers chrétiens.
C’est par notre vérité de vie que nous sommes, avant tout, missionnaires ! Le reste se rajoute.
Cette circulation de vie, cette circulation d’amour, d’agapè, nous conduit à cette unité de vie et d’action qui manifeste, comme naturellement, ce que nous croyons et ce que nous espérons.
« Ce que je vous commande, c’est de vous aimer les uns les autres » dit Jésus.
Dans l’Église, qui est l’humanité recréée, l’amour fraternel, et réciproque, est vivant. Il s’adresse d’abord à nos frères et sœurs dans la foi.
Il est beau d’aimer les gens qui habitent à « 10 000 km » qu’on ne voit jamais… mais il est parfois un peu plus délicat et exigeant d’aimer ceux qui sont proches de nous.
Et cet amour doit s’adresser d’abord à nos frères et sœurs chrétiens. Sans être exclusif, il commence par eux pour se diffuser et s’élargir à tous les hommes, sans exception et sans condition, connus ou inconnus… à tous ceux que nous croisons sur le chemin de notre vie.
Frères et sœurs, nous pourrions résumer ces textes du Dimanche par trois mots : Amour, Joie, Fraternité, dans la charité.
Un amour de Dieu qui nous rejoint et nous dilate. Un amour qui donne sens à notre vie et nous ouvre à la joie.
Joie de ceux qui se savent aimés gratuitement, et veulent partager cet amour et cette joie dans une vie fraternelle et communicative au sein de l’Église, notre Mère ; pour s’ouvrir à tout homme quel qu’il soit – quels que soient son parcours et son passif – dans l’attente paisible, patiente, sereine, de la venue de Jésus à la parousie et de notre accomplissement éternel dans le Royaume de Dieu.
Amen ! Alléluia !